Les mots qui tuent par Minuitetdemi
La plume est plutôt élégante, sobre, efficace et le sujet du roman est digne d'intérêt, bien qu'un peu mystérieux. Mais ce petit roman est également truffé de problèmes de narration qui le rendent extrêmement "dommage". L'introduction proportionnellement très longue, très fouillée bien qu'évasive nous permet d'entrer dans le petit monde de l'héroïne.
Premier problème, à mon sens, la demoiselle est extrêmement particulière, issue de l’immigration politique tchèque, d'une mère célibataire qui se sert d'elle comme faire-valoir mais semble viscéralement incapable de l'aimer ou même de la toucher, l'héroïne promène en plus des casseroles de "fille différente" rejetée par ses petits camarade et d'un sérieux complexe d'infériorité par rapport aux rares "amies" qu'elle a pu avoir.
Ca n'a l'air de rien, mais ça rend extrêmement difficile l'attachement ou l'empathie avec elle, et là où c'est problématique, c'est que tout l'objet du livre repose sur l'empathie désirée entre le lecteur et le personnage: il faut comprendre les motivations, comprendre l'espèce d'innocence, le sens des priorités qui a été tordu par la vie.
Et à mon sens, ça ne passe pas du tout. Parce qu'elle est trop particulière, ou parce que le sujet du roman apparaît comme une chute, rapidement menée, presqu'en dehors des pages, peut-être parce qu'on nous sert un "happy end" avec une romance en arrière plan et beaucoup de repentir, ou peut-être, tout simplement, parce qu'on ne croit pas une seconde à l'âge de l'héroïne, que tout enfant sent "l'adulte" derrière les mots, et la réflexion qu'il essaye de nous vendre.
Ca reste un joli roman, pour son style, pour les relations âcres d'une jeune fille avec sa mère et sa grand-mère, pour quelques images, il y a quelque chose du décor en carton, de l'odeur d'un pot pourri ou d'un vieux placard qu'on aurait ré-ouvert. Bref, un roman qui peut plaire, peut-être, et que je fais ma critique de "trop vieille" mis je trouve extrêmement dommage qu'il passe aussi loin de son sujet, qu'il soit si court et qu'on oublie jusqu'au nom de l'héroïne quasi instantanément.
Mara, ça avait du potentiel, quand même.