De 2016 à 2020, David Geselson a rencontré, à la manière d’un écrivain public, des dizaines de personnes à qui il proposait d’écrire la lettre qu’ils rêvaient d’envoyer, sans jamais réussir à le faire, à un proche. Au fil des années, ces lettres ont été lues lors de ses spectacles, et certaines composent maintenant ce livre.
L’idée est bien sûr très jolie et promet un parcours riche en émotions : de fait, bien vite, le recueil se mue en répertoire de blessures intimes. Ceux à qui on n’ose pas écrire, ce sont des disparus, des parents abusifs avec qui on n’arrive pas totalement à rompre, des ex toxiques ; ce dont on n’ose pas parler, c’est la maladie, la mort, la solitude, les remords.
Tout ceci compose un paysage sentimental d’une infinie tristesse, mais surtout - et c’est là que Lettres non-écrites rate totalement son effet - d’une infinie banalité.
D’une part parce que, dans le fond, et contrairement à ce que pourra en dire Tolstoï, toutes les familles malheureuses se ressemblent. Et d’autre part parce que le protocole de David Geselson, qui prévoit que les gens parlent puis qu’il écrive, seul, la lettre, tend à gommer toutes les singularités, à écraser les personnalités sous la même écriture somme toute assez banale : aucun de ces inconnus n’a vraiment de voix, puisque Geselson parle à leur place. Ainsi, si le travail d’écoute et l’offre d’un exutoire restent tout à fait louables, la dimension littéraire, elle, tombe totalement à plat.