Zorba, c’est bien sûr ce type qui danse sur une plage crétoise, un cliché ambulant d’office du tourisme grec - dont la fameuse danse, c’est bien connu, n’est même pas traditionnelle mais a été inventée pour le film adapté du roman(que je n’ai pas vu soit dit en passant). Avant d’en arriver là, Zorba, c’est un homme mûr qui a suivi presque sur un coup de tête le narrateur de notre roman, jeune intellectuel qui a décidé soudain de devenir patron d’une mine en Crète. Juste une péripétie de plus dans la longue vie de Zorba, qui a roulé sa bosse partout et dispense à notre jeune narrateur qui n’a encore vécu que dans les livres sa rude philosophie.
Bien sûr il y a des rebondissements dans cette histoire de mine, et des plus truculents, mais on s’en moque un peu : on est là pour ce long dialogue entre une vision du monde rugueusement matérialiste, rebelle et ardente, à la fois pessimiste et prompte à s’émerveiller - celle de Zorba -, et une vision confiante dans le salut et la bonté, bourrée d’idéaux et de principes mais en mal de volonté pour les faire vivre - celle du narrateur.
Il y a beaucoup de choses qui me parlent là-dedans, même si parfois Kazantzaki devient un peu sentencieux voire se met à faire dans le développement personnel. Mais j’aurais sans doute bien mieux profité de tout ça si je n’avais pas été accablé par les longs et nombreux commentaires de Zorba sur ce grand, cet immense mystère, j’ai nommé : la femme. Non pas les femmes, ce qui serait encore insuffisamment réducteur, mais la femme, cette entité unique et indistincte, que l’on fait mine de révérer (pour son physique) pour cacher, et encore, à quel point on la méprise, tandis qu’on glose fièrement sur les qualités qui font que l’on est soi-même Un Homme Un Vrai, etc. J’ai beau faire tous les efforts de relativisation (« c’est le reflet d’une époque révolue », et tout ce que vous voudrez), il y a vraiment des choses que je n’arrive plus à lire.