C'est sur un présemptoir de bibliothèque que je tombe sur ce bouquin, classé en tête de liste par les lecteurs dépendants de la charmante bourgade qui jouxte la mienne.
Il est des livres qu'il suffit d'ouvrir pour perdre pied avec la réalité, ou plus précisément, pour lutter avec la réalité lorsque surviennent les dernières pages et qu'on croit encore pouvoir contenir cette envie de pisser incongrue, surtout une bonne heure plus tôt lorsqu'on pensait qu'il ne restait pas long de lecture.
Mamie Luger.
Bel ouvrage.
Une bonne claque dans la gueule pour te rappeler que la justice des hommes porte bien son nom.
Mamie Luger / Berthe / La Veuve Noire est une légende, un esprit impétueux et superbe, magnifique, sombre, passionné, libre.
À une époque où la femme seule était comme une maladie vénérienne, Berthe grandit et évolue dans une maisonnée de femmes. L'esprit gonflé d'amour et de liberté elle connaît des moments de grâce et de bonheur qui lui confèrent les armes nécessaires aux combats à venir.
On parle de racisme, de viol, de violence conjugale, de mépris et autre dédain en passant par un machisme et un patriarcat dégeulasses.
Ce bouquin relève ses manches avec une grand mère centenaire qui détonne en nous balançant de bien ténébreuses vérités qui tonnent bizarrement familière à nos oreilles de 2018-2019.
Du crime de guerre à meurtre de sang froid en passant par légitime défense, cette femme réagit là où beaucoup y ont laissé leur vie.
Ce livre, écrit par une main de maître par un homme (la précision s'impose) est un éloge à la lutte féminine.
On nous défend sur tous les plans, matrimoniaux, sociaux, sur la soi-disant égalité des sexes, sur la justice des femmes et sur les maux qu'on ne dit pas et qui ne constituent pas de preuve, sur les violences morales et physiques, sur cette affreuse bassesse qu'est de parler de ses menstruations à une femme simplement en colère -affront ultime persistant au fil des décennies-.
Ça fait un bien fou, un bouquin pareille, parce que beaucoup de femmes sont derrière ce Luger, cette pelle, la carabine de Nana .22, et frappent en même temps que Berthe.
Ce héro d'une vie bien longue et d'une époque qui nous reste lointaine est un hommage aux femmes du monde entier, pour leur rappeler que rien n'y personne ne doit les empêcher d'êtres heureuses, amoureuses, vivantes et libres.
Que bien trop souvent, la justice n'est pas en ce qui concerne les femmes (encore aujourd'hui quand on voit comment sont traitées les victimes de viol qui ont déjà des couilles monstrueuses de faire appel à "la justice des hommes"), et que l'on devrait toutes se défendre face aux agressions sexuelles, aux harcèlement moraux et physique, à la torture, et à tous les cons sur nos chemins, et vivre libres sans avoir à s'en excuser.
Touchante mais déchirante, cette histoire est une des meilleures que j'ai lu récemment.