« Ce n'est pas vrai que ce qui compte, c'est où on arrive. Ce qui compte, c'est d'où on vient.» Marina et Andrea, nés dans les Alpes piémontaises, une région frappée de plein fouet par la crise et désertée peu à peu par ses habitants, hormis les laissés pour compte, vont mettre du temps à le comprendre et à l'admettre, davantage elle que lui, il faut bien le dire. Ces deux là, qui s'aiment depuis longtemps d'un amour qui fait mal comme une rage de dents, et qui n'ont de cesse de se faire souffrir, sont les héros de Marina Bellezza, le dernier roman de Silvia Avallone, révélée par le viscéral et incandescent D'acier. Ce nouveau livre ressemble par bien des points à son prédécesseur. Trop sans doute pour qu'on accroche d'emblée. Tout y semble outré : les fêlures d'enfance, les ravages du temps, la déliquescence sociale. Et Marina et Andrea sont des rebelles comme les adolescentes de D'acier. Et prêts à tout pour arriver au bout de leurs rêves chimériques, la célébrité et les paillettes pour l'une, quitte à piétiner tous ceux qui croisent sa route ; le retour à la nature et à la vie d'antan pour l'autre, même en payant le prix de la solitude et du mépris paternel. Marina Bellezza est une vraie tête à claques, une starlette capricieuse, qui ferait passer Lady Gaga pour une sainte nitouche. Bien entendu, elle est fragile comme le cristal et traîne ses douleurs de petite fille comme un boulet. Silvia Avallone ne nous prend pas en traître, le lecteur sait pertinemment qu'il va se faire manipuler et devoir avaler des rebondissements parfois dignes d'un mauvais mélo. A vrai dire, on ne résiste que pour la forme tellement la puissance de cette romancière subjugue et nous fait capituler après plus de 500 pages éreintantes. Parce qu'Andrea, le néo-fermier naïf, et Marina, la diva provinciale, se révèlent attachants même s'ils sont pathétiques. Ils ont une telle hargne et volonté de sortir du troupeau et de s'inventer une vie qui leur ressemble. Il y a du sang, de la sueur et des larmes. Et un coin de ciel bleu ? Ce n'est pas dit mais l'important c'est d'y croire, d'en découdre et de ne pas baisser la garde. Marina Bellezza est roman de combat. Une guerre sans merci pour la survie. Ou pour une vie sans compromissions.