A la mort de son frère, Monsieur Ma entre en possession d'un magasin d'antiquités situé à Londres. Lui qui passait son temps à ruminer ses échecs professionnels entre deux verres d’alcools, le voici embarqué pour l’Europe en compagnie de son fils Ma Wei. Grâce à l'aide du pasteur Evans - car les Ma sont protestants -, nos deux Pékinois s'installent chez Mrs Window, veuve et mère d'une jeune fille aussi jolie que délurée. C’est alors la découverte de la capitale britannique et de la civilisation occidentale, si opposée aux valeurs chinoises. Mais on dit que l'amour n'a pas de frontières et lorsque les sentiments s'en mêlent, Messieurs Ma père et fils ont bien du mal à choisir entre cœur et tradition…
Dans ce roman jubilatoire, Lao She révèle l’incompréhension et le racisme qui séparent Orient et Occident dans les années 1920. Pourtant aucune rancœur ne transparaît au fil des pages ; le romancier a plutôt misé sur l'humour. Ces « diables d’Occidentaux » sont incarnés par des personnages hauts en couleurs, parfois même attachants. Mais c’est surtout le point de vue des Chinois qui retient l’attention: partagés entre le mépris et l’admiration pour les Britanniques, ils tentent tantôt de leur plaire, tantôt de les défier, sans jamais pouvoir s’intégrer à cette société aux antipodes de la Chine. A la croisée de ces deux mondes, on trouve Napoléon, le favori de Mme Window, qui n’est autre qu’un pékinois ! C’est d’ailleurs ce petit chien qui permet un rapprochement entre les logeuses et leurs locataires orientaux.
Lao She a lui-même vécu pendant plusieurs années à Londres. C’est avec un grand talent qu’il dépeint les beautés de la capitale, ses parcs fleuris, son brouillard automnal, sans oublier la frénésie qui s’empare des habitants à la veille de Noël. Mais en ces lendemains de guerre, l’Angleterre éternelle est bouleversée par toute une série de progrès, au rang desquels figure l’émancipation de la femme. Sous la plume de Lao She, même les situations les plus comiques donnent à réfléchir; elles interrogent sur les différences culturelles, mais aussi sur les sentiments humains dans toute leur universalité.