En voilà une lecture engloutissante ! 450 pages d'affilée, l'idéal pour occuper une nuit d'insomnie. Dés les premières pages, cette façon d'écrire les dialogues, vive et parfaitement adaptée au contexte, rendant la lecture fluide et agréable.
JP pour Jean-Pierre, gamin d'une grande fratrie de six garçons, vivant en pleine cité avec une mère effacée et un père violent. Souvenirs de chamailleries entre frangins, d'un soir de coupe du monde de football ou toute la cité résonne des espoirs de chacun, des coups encaissés en silence par sa mère. Et puis ensuite l'école, la rentrée. Les copains, la découverte de la vie, l'école primaire. Dans la classe, un garçon sort du lot : Barthélémy. Il a les cheveux longs, ondulés. Il parle bien, est bon élève. La tête à claque idéale.
D'années en années, JP et sa bande le choisiront comme souffre douleur. A l'âge de la sexualisation, quand les garçons commencent à se la mesurer, à découvrir le plaisir qu'ils peuvent se donner le soir en cachette sous la couette, Barthélémy devient leur pédé, parce que trop raffiné, trop différent. Parce que nul en sport. L'adolescence sera sans répis, et Barthélémy devient le souffre douleur de tout le collège. Il encaisse sans rien dire les brimades permanentes, les violences. Même l'inacceptable. Et JP est intrigué, il aimerait comprendre Barthélémy, et il le déteste un peu pour ça, pour ce qu'il lui renvoi, pour cette grande inconnue qu'il représente.
Le récit est violent, souvent révoltant. J'étais absorbé par ce récit de violence quotidienne, qui tient de la réalité pour beaucoup, plus que de la fiction.
Et puis des années plus tard, le récit reprend. JP fête ses trente ans. Obnubilé par sa queue, par le sexe, par le plaisir. Il passe ses journées à se branler devant des films de Clara Morgane, à mater les mecs en étant persuadé qu'il les fait bander eux aussi, et ça le dégoute. Pourtant tout se joue là, cette homosexualité refoulée, ce désir pas assumé qu'il transpose aux autres.
Il recroisera Barthélémy, à l'autre bout de la France. Et là tout vascille, c'est la spirale. Il ne l'a pas oublié, il est sûr qu'il est pédé, qu'il aimerait bien se faire sauter, qu'il aimerait bien être sa petite pute. Alors il l'approche. Devient ami. Barthélémy ne se doute de rien. Ils deviennent collègues, puis meilleurs amis. Et toujours, cette obnubilation pathologique, à la limite de l'érotomanie. Jusqu'à cette fin, brillante, libératoire. 450 pages d'une traite mais putain, quel bouquin.