La preuve que je ne suis pas un "littéraire".
D'abord commençons par l'application d'un syllogisme qui se révèlera faux. Parce que le livre dont on va parler m'a été offert par quelqu'un qui, parcourant les rayons d'une librairie, tombe sur ce livre.
Oh, v'là un livre sur Jane Austen.
Jean aime beaucoup les romans de Jane Austen
Donc Jean va aimer ce livre….
Oui, mais non. L'histoire racontée dans le roman d'une certaine Gill Hornby, c'est la mise en scène de Cassandra Austen, sœur de Jane qui, à sa mort, est devenue son exécutrice testamentaire. Elle s'est donnée pour objectif de préserver la mémoire de sa sœur et pour ceci, doit récupérer toutes les lettres qu'elle a pu écrire et qui pourraient être utilisées à mauvais escient.
On imagine tout de suite le reste du roman qui va faire revivre Cassandra et Jane plus jeunes à travers ces fameuses lettres et surtout faire ressortir les bons et mauvais souvenirs. Tout est imaginaire dans ce roman y compris les lettres de Jane reproduites ; mais bien entendu, c'est sans compter les allusions fines à ses romans que Jane Austen est en train d'écrire. Enfin, les allusions fines ! Celles que j'ai comprises, ce sont celles complètement explicites où les personnages du roman de Gill Hornby discutent des personnages des romans publiés. Parce qu'à mon avis, je suis bien certain qu'il y a des tas d'allusions où tel personnage réel (du roman de Hornby) va se retrouver dans tel personnage d'un roman de Austen. Et celles-là m'ont échappé parce que je n'avais tout simplement pas envie de les chercher.
C'est en ça que je dis détenir "la preuve" que je ne suis pas littéraire car lorsque j'apprécie un roman, je n'ai pas envie de prolonger – de façon interne - le roman à travers une "exégèse" ou une analyse détaillée du texte et des personnages. Jamais. Quel que soit l'auteur.
Je considère toujours qu'un roman d'un auteur est un bloc : si j'apprécie le roman, je le prends tel quel et je considère qu'il se suffit à lui-même. A mon imagination de faire le reste sur la base du roman. Je considère que si Austen n'a pas éprouvé le besoin de s'épancher sur son roman du style "telle nana, eh bien, figurez-vous que c'est ma tante qui est con comme ses pieds" ou "tel mec impudent de tel roman, c'est monsieur x qui ne m'a jamais regardée", alors j'ai à respecter scrupuleusement son silence.
Dans le roman de Hornby, je me fais l'effet d'un voyeur. Même si le style de cette romancière reste dans de très bonnes convenances. Heureusement d'ailleurs. Si cela n'avait pas été le cas, j'aurais abrégé ma lecture.
Au final, le livre est sûrement très bien, sûrement passionnant et très riche : le problème est qu'il ne m'intéresse pas. Probablement parce que je n'ai pas l'esprit suffisamment littéraire.