Ce n'est pas vraiment une histoire. Il n'y a que quatre personnages qui se partagent les pages de ce roman. Bernard et Marie sont des étudiants d'extrême-gauche de la fin des années 1960. Ils décident de travailler à l'usine à la fois pour se forger, c'est le cas de le dire, et faire avancer la Révolution. Ils ont un enfant, Pierre, mais Marie l'abandonne lui et son père. Jeanne, sa petite amie, va s'intéresser à cette histoire, cette absence, quasiment 20 ans plus tard.


Ce sont des personnes communes, pour reprendre le titre du livre. Ce ne sont pas des figures littéraires, des forces de caractère. Chloé Thomas précise bien que leurs noms n'ont que peu d'importance. Ce sont des exemples. Ils sont des militants déçus, des jeunes gens sans passions, des personnes qui constatent une absence. Celle de Marie, à moins que ce soit celle de leurs espoirs, de franches aspirations. Ce qui intéresse avant tout Chloé Thomas, c'est leur psychologie. Qu'elle découpe en fines tranches. Toutes ces nuances qui déterminent au mieux la psyché humaine.


Et elle le fait d'un œil clinique, froid et détaché, comme un psychanalyste. D'autant plus qu'elle ne leur accorde que peu de qualités, dans cet étalage de nuances qui tirerait plutôt vers le bas. Mais l'attachement survient, fragile. Sur d’autres points que ce qui pourrait leur arriver. Car de toutes façons, il ne se passe pas grand chose. Deux voyages, quelques rencontres, et surtout beaucoup de souvenirs.


Ce premier roman est écrit d'une plume appliquée. On trouvera le style parfois pesant. D'autres fois aérien, oral. Les phrases sont longues, entrecoupées de tous les moyens de ponctuation possibles, comme autant de respirations. Lire ce roman demande un effort, qui sera parfois récompensé, parfois déçu. D'autant plus que Chloé Thomas écrit presque en même temps qu'elle raconte, il y a une couche supplémentaire, qui commente ce qu'elle écrit. C'est une remarque sur les prénoms choisis, sur les personnages qui n'apparaissent pas, ou ces banalités d'écriture, ces lieux communs.


C'est un roman qui m'a fait penser à un autre, La vie est faite de ces toutes petites choses de Christine Montalbetti. Il y a a un commentaire sur le roman qui se construit, et toutes deux appliquent une certaine rigueur dans la description de leurs personnages. Mais Chloé Thomas le fait froidement, insistant sur la mentalité de ses personnages, et n'en ressort pas le meilleur, là où il y avait beaucoup d'émotions franches dans celui de Christine Montalbetti.


Plus qu'un roman, il ne s'agit peut-être que d'un exercice de style, une plongée dans l'âme humaine où les événements seraient flous et les sentiments incertains. C'est une œuvre curieuse. Mais comme dans de nombreux premiers romans, la volonté de bien faire, de s’appliquer, de faire de la littérature, est trop perceptible.

SimplySmackkk
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le 22 juin 2019

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