La fée électricité
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Le sentiment donne de la vérité aux mots et une vie aux images
"J'aime les dessins qui représentent la rose trémière, l'oseille des bois. Les étoffes à fond grêlé me plaisent." Quel plaisir procure ce condensé d'âme japonaise et avec quelle facilité le pinceau communique les impressions qui le meuvent !
Les mots parlent aux images et les images écoutent
Apposer les estampes d'Hokusaï au texte de Sei Shōnagon alors que sept siècles et une condition sociale très différente séparent les deux esprits peu sembler pour le moins étonnant, mais tandis que l'on tourne les pages, on se persuade bientôt que ce rapprochement relève de l'évidence même. Il y a de quoi être stupéfait car le dialogue fonctionne parfaitement. Il faut souligner l'intelligence et souvent la subtilité des mises en regard. Notes et estampes montrent que le vieux fou de dessins et la femme de cour partageaient une certaine excentricité, une attention particulière aux choses a priori insignifiantes, un regard sans cesse renouvelé – comme si chaque matin, il naissait avec la rosée. Si Les Recherches philosophiques tendent à indiquer que "la cécité est apparentée au manque d'oreille musicale", la preuve est ici donnée que la réciproque de cette proposition est vraie, tant la sonorité du catalogue de monts, de cascades et de rivières enchante la vue.
Pensées pour moi-même
Les impressions de la poétesse confinent souvent à la naïveté et n'en sont que plus touchantes. C'est là le charme essentiel d'une écriture si travaillée qu'elle paraît enfantine, déroutante de simplicité. "Les poètes mentent trop" se désolait Nietzsche mais la sincérité du cœur de Sei ne fait aucun doute. Et pourtant, si garder des secrets, c'est mentir un peu, alors, délicieuse pudeur, Sei cache des choses. "Les mots par lesquels j'exprime mon souvenir sont ma réaction au souvenir." pensa Wittgenstein ; Sei parvient à livrer une réaction authentique tout en camouflant au besoin le souvenir d'où elle est issue. En somme, sa maîtrise de la grammaire rend accès à l'essence des choses.
Les yeux tournés vers le soleil levant
La traduction en français et les notes d'André Beaujard savent trouver le difficile équilibre entre érudition et fluidité de la langue. On reprochera seulement à ce merveilleux partage la traduction approximative des noms des instruments de musique et celles plus coupables de "jeu de go" par "jeu de dames" et de "go-ban" par "damier". Les aventures aux 361 croisées des chemins sont encore trop rares dans notre pays – pays qu'une japonaise de l'ère Heian jugerait à bon droit dépourvu de culture et de poésie.
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Créée
le 3 juin 2023
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