Ce livre fait partie du cycle de Jean Hougron "la nuit indochinoise".
Il a été publié en 1960 et est le dixième opus du cycle. L'action se déroule en France.
Le narrateur, André Essen, raconte les derniers mois de sa vie. Jeune, il fut un voyou. Fils d'un boutiquier de province, la vie tranquille qu'on lui destinait le faisait gerber. Après un certain nombre d'exactions en tous genres, on lui donne le choix : le trou ou l'armée en Indochine pour se refaire une "virginité". La virginité acquise après un "contrat" qu'il gère au minimum syndical, il se crée une situation en Indochine dans une maison sérieuse avant de la quitter pour des activités plus ou moins licites, avant de finir par une expulsion et un retour en France dans un emploi, cette fois, très bien rémunéré où il peut développer de sérieuses compétences, de tueur à gages. Tout ceci en une grosse dizaine d'années.
Et puis tout s'use, l'assassinat sur commande finit aussi par le lasser, sa dernière opération est un fiasco et le voilà face à son destin, face à ses employeurs qui ne font pas vraiment dans la dentelle, comme on peut se douter.
Ce livre publié en 1960 est un peu comme si on voyait l'envers du décor du film très mystérieux de Jean-Pierre Melville, "le Samouraï". Melville ne dévoile rien de son personnage, du Samouraï. Ou si peu. Ici, le narrateur fait, au contraire, un retour – saisissant – sur sa vie, sa haine du genre humain, l'amour d'une jeune femme, qui reste un fragile ilot d'espoir vain.
Plusieurs choses sont intéressantes dans ce livre : le portrait d'une petite frappe qui se construit peu à peu dans la haine de la société. L'être asocial, par excellence. Un loup solitaire. Je viens d'en parler. Non plus intéressant, c'est le retour dans la ville natale où il retrouve son frère qui a pris la suite du père dans le commerce. Il peut mesurer que le décalage de départ est devenu un gouffre d'incompréhension. Ses fréquentations d'alors qui voulaient, aussi, tout bouffer ou tout casser, c'est selon, sont rentrées pitoyablement dans le rang. Lui, André Essen, a changé de catégorie (de calibre, pourrais-je dire ?) pour faire partie de l'aristocratie des voyous. D'ailleurs, alors que certains fonctionnent désormais au gros rouge, lui, va à la bibliothèque municipale et emprunte un livre sur les pharaons …
Un samouraï, je vous dis…