Le dernier tome de la Trilogie des ombres nous permet de retrouver Flovent et Thorson qui enquêtent cette fois-ci sur le meurtre d’une jeune fille dont le corps a été retrouvé derrière le Théâtre national.
Dans La Femme de l’ombre, le grand écrivain islandais s’intéressait à la période où les soldats américains prenaient le relais des soldats anglais pour occuper l’île, en pleine Seconde Guerre mondiale. En 1944, les soldats anglais sont partis depuis un an : certaines Islandaises s’accommodent très bien de ce changement et en profitent pour sortir avec des soldats américains, ce que l’on appelle « la situation ». Alors qu’un Américain et une Islandaise s’embrassent loin des regards, derrière le Théâtre national, ils découvrent le corps abandonné d’une jeune couturière.
Soixante ans plus tard, l’ex-inspecteur Konrad, semblable par bien des points à Erlendur Sveinsson, est chargé par une ancienne collègue d’aider à la résolution du meurtre de Thorson, soldat canadien mais islandais de naissance, qui avait enquêté sur le mystérieux meurtre du Théâtre national. Alternant chapitres sur la Seconde Guerre mondiale et enquête contemporaine, Arnaldur Indridason tisse une nouvelle toile qui fait froid dans le dos : deux jeunes filles assassinées et violées, à qui le meurtrier avait soufflé de mettre cette affaire sur le compte des elfes.
Après avoir retrouvé les deux inspecteurs des tomes précédents de la Trilogie des ombres, le lecteur retrouve les thèmes de prédilection de l’auteur islandais, et particulièrement celui de la paternité. Le père est souvent absent ou, lorsqu’il est présent, se révèle violent, alcoolique et manipulateur. Et si celui-ci est un être détestable, faut-il cacher les crimes commis pour préserver l’honneur de la famille ? Malgré une certaine lenteur, la force de ce roman tient à la réflexion sur la façon dont s’immisce un drame dans une famille : ce sont des parents à qui on annonce la mort de leur fille adoptive ou encore un vieil homme qui découvre de terribles secrets familiaux. Le meurtre, chez Indridason, détruit aussi bien la cellule familiale du bourreau que celle de la victime.
« Le vieil homme et sa femme étaient silencieux, les mains posées sur les cuisses. Flovent ne pouvait que compatir à leur douleur muette et constater à quel point ils étaient incrédules et désemparés face à ce drame incompréhensible.
– C’était une jeune fille si belle et si douce, conclut l’épouse. Je ne comprends pas comment de telles choses peuvent arriver. Ça dépasse l’entendement… »