Dans ce roman, on suit les pas de Ren, ancienne chercheuse, pilote devenue mainteneuse d'imprimantes 3D de tout type sur une planète où une expédition s'est posée pour étudier un artefact extra-terrestre. Il semble s'agir d'une expédition sans retour pour étudier une curieuse cité extra-terrestre. De cette expédition, on ne saura pas grand chose. Comment elle s'est montée ? On n'en sait rien. Comment le voyage s'est passé ? On n'en sait rien non plus. Cette mission avait-elle des objectifs scientifiques ou philosophiques ? Toujours aucune idée. Ce qu'on saura assez vite, c'est que la figure de proue, Suh, qui a tout fait pour que cette expédition ait lieu, est morte très vite, et que sa mort est à l'origine d'une espèce d'escroquerie un peu curieuse en lien avec une nouvelle forme de religion. Et évidement, dans cette communauté fermée, l'arrivée d'un intrus viendra détruire l'équilibre local.
Ce roman est un vrai renversement de bien des poncifs de la science-fiction. En effet, si on est sur une autre planète dans le cadre d'un roman de découverte d'un big dumb object, toute cette quincaillerie n'est en fait qu'un décor pour l'exploration de la psyché de Ren. Et pour le coup, la complexité est bien plus à l'intérieur qu'à l'extérieur. Entre son histoire sur Terre (une vie de famille un peu délicate aussi bien avec ses parents qu'avec ses enfants) et ses responsabilités dans la communauté, il y a bien des choses à écrire. Autrement dit, c'est un vrai roman psychologique dans un décor de science-fiction. C'est surprenant, mais au bout d'un moment, on s'y fait.
Et à ce moment, au moment précis où on se rend compte que la science-fiction n'est qu'un décor, le décor prend toute sa saveur. Parce que le roman est sacrément bien fait, les artefacts science-fictifs ont un rôle intéressant dans l'histoire sans pour autant prendre la place au coeur du récit, qui est l'exploration de la psyché de Ren. Ca n'est pas dommage, hein, mais il y a quelques trucs vraiment chouettes : des imprimantes 3D utilisables pour tout construire, des implants cérébraux fournissant de la réalité augmentée, ou un réseau social directement intégré. Ce qui est vachement bien traité,c e sont les impacts sociaux de ces innovations. On voit par exemple comment l'hyper-communication favorise les aspects émotionnels. Ca n'est aujourd'hui pas surprenant, mais c'est bien vu de donner à cet aspect déplaisant de la réalité une forme science-fictive.
Ce qui nous amène au dernier point intéressant.
Parce qu'en plus d'une analyse psychologique, il y a dans ce roman une classique histoire de retour du fils prodigue et/ou de trahison. Cette histoire est parfaitement classique. Mais son intégration dans un contexte à la fois classique et surprenant lui donne une tournure bien vue. A ce sujet aussi il y a tout un tas de trucs qui ne sont pas expliqués (comme par exemple la manière dont le jeune homme revenant du désert a survécu sur cette planète à priori peu hospitalière).
Je ne vois dans ce roman que très peu de choses loupées. Le plus important étant que, malgré toutes les qualités de ce roman, je n'arrive pas à m'intéresser aux études psychologiques. Et c'est dommage, parce qu'on est loin là de l'ennui que je peut ressentir en lisant par exemple les bouquins d'Ursula Le Guin. Le roman est habilement construit, les personnages sont intéressants, mais je n'arrive pas à m'intéresser aux errances psychologiques de personnages qui devraient plus s'intéresser au monde extérieur. A part ce défaut (qui est plus un défaut du lecteur que de l'oeuvre), c'est un très bon roman.