Le réalisme magique n'est pas l'apanage de la littérature latino-américaine, il peut parfaitement s'adapter à un pays comme l'Iran (ou la Perse), forte d'un folklore d'une grande richesse, même si largement mise sous le boisseau depuis la révolution islamique. Dans Quand s'illumine le prunier sauvage, Shokoofeh Azar ne lésine pas sur les djinns (toniques), les fantômes, sirènes et ectoplasmes en tous genres qui viennent brouiller et perturber l'aspect par ailleurs réaliste d'un roman qui raconte la violence des exactions du temps de l'Ayatollah Khomeini. Une façon de montrer comment des esprits libres et tolérants, comme ceux de la famille de la narratrice du livre, âgée de 13 ans pour l'éternité car elle est morte en 1979, luttent pour préserver leur indépendance. Une narratrice fantôme, donc, ce qui ne l'empêche pas d'être l'observatrice attentive et parfois agissante du destin de ses proches, lequel est plutôt tragique quoique assez baroque. En outre, Shokoofeh Azar n'hésite pas à digresser et à évoquer l'existence agitée d'autres personnages hauts en couleur. Quand s'illumine le prunier sauvage est un livre habité et halluciné qui séduit assez souvent pour son incitation à explorer l'invisible et l'étrange mais qui pêche peut-être par excès de fantasmagorie, se révélant plus efficace quand la narration redevient sobre, documentée et poignante. Tout est question de dosage, finalement. Est-ce que trop de magie tue le réalisme ? Garcia Marquez et d'autres ont prouvé que non mais c'est comme toujours au lecteur de faire la part des choses et de se montrer sensible ou non aux sortilèges des djinns et consorts.

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le 17 déc. 2021

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