Une chose est acquise, j'ai dévoré mon premier Joncour. A vrai dire, je ne m'attendais à rien de précis, ne connaissant pas l'auteur, mais il a suffit d'une critique élogieuse de ma complice babéliote, SabiSab, pour me lancer dans l'aventure à mon tour.
Avant d'être la mienne, l'aventure c'est celle de Ludovic et d'Aurore, deux êtres que tout oppose mais qui vivent dans le même immeuble. Enfin, pas exactement dans le même, elle est sur rue dans un appartement standing haussmannien ultra-confort, lui est sur cour, dans un logement vétuste à escalier raide et humidité stagnante. Fatalement, un soir, c'est la rencontre. Ça aurait pu se passer dans le local poubelles ou devant les boîtes aux lettres, mais ce fut dans la cour, ce modeste havre de paix retranché du Paris bruyant et stressant. Elle styliste, lui recouvreur de créances ; deux sphères distinctes, deux mondes aux antipodes l'un de l'autre mais aussi deux solitudes qui s'aimantent irrésistiblement jusqu'à imbriquer leurs vies étroitement, avec conséquences irréversibles à la clé.
Malgré ce canevas somme toute assez classique - pour ne pas dire convenu : Paris intra-muros, le voisinage, la Parisienne tout en bourgeoisie, le provincial tout juste descendu de son tracteur, ça fonctionne bien. Difficile de lâcher le roman un fois commencé, on veut connaître la fin, tout en redoutant les clichés, on attend avec une certaine impatience un twist final. Au début, j'ai eu quelques craintes, les stéréotypes semblaient justement tapis dans l'ombre de cette cour d'immeuble où il se passe de drôles de choses, pourtant, la narration efficace a opéré sa magie et l'ancienne-parisienne-frustrée-devenue-provinciale-heureuse que je suis s'est laissée émouvoir avec une pointe de nostalgie par la rencontre fusionnelle entre Aurore et Ludovic.
Il se dégage une réelle intensité de ce récit qui commence comme une bluette et prend des allures de thriller ; le lecteur est pris dans un beau crescendo. Les éléments poétiques - dont quelques uns un peu outranciers comme les tourterelles (c'est quand même du lourd) -, apparaissent néanmoins plein de douceur et de légèreté, comme des bulles d'oxygène salutaires qui s'échapperaient du stress citadin, emportant les personnages dans un ailleurs romanesque, à l'instar de Clémentine dans sa bulle bleue.
Je pense que je retenterai l'aventure Joncour quand elle se présentera à nouveau devant moi. Le style scénaristique de l'auteur m'a conquise, d'ailleurs j'imagine très bien une adaptation ciné avec Matthias Schoenaerts et Bérénice Bejo en tête d'affiche.