Que voilà un bien doux roman.


D’après la plus célèbre des encyclopédies en ligne, Rosamunde Pilcher serait spécialisée dans les romans sentimentaux. Je ne sais pas ce qu’est un roman sentimental alors. Dans mon esprit, c’est un roman où les protagonistes sont pris dans une histoire d’amour niaise et coupée de la réalité. Ce n’est pas l’impression que j’ai eue ici, même si je reconnais qu’on est bien loin de la noirceur des thrillers et autres polars.


En lisant cet ouvrage, j’ai certes lu des sentiments. Enfin, je les ai partagés, vécus avec les protagonistes. Toute une gamme de sentiments, allant de la colère et la peur à l’amour, oui, l’amour, celui qui fait partie de nos vies, tout le temps : l’amour pour ses proches, ses parents, celui pour ses amis, le premier amour, l’amour plus profond qui naît avec le temps… La peur, aussi, celle de l’adolescente en proie à un vieux dégoûtant, ou celle de toute une génération face à l’inéluctabilité de la guerre. Le chagrin profond face à la mort. Bref, des tranches de vies. Donc faites de plein de sentiments. Mais pas niaiseux (enfin, pas toujours).


L’histoire ? Judith est une jeune britannique issue de la petite bourgeoisie. A la grande époque du colonialisme, son père est détaché à Ceylan, puis à Singapour. Pour qu’elle puisse suivre sa scolarité dans de bonnes conditions, il est décidé qu’elle ira en pension. Là, elle rencontre Loveday, une ado de son âge, mais issue de la classe sociale supérieure, et dont elle deviendra très proche. Et puis on accompagne Judith durant 10 ans…


Je retiendrai surtout de ce roman son aspect historique. Nous évoluons dans une société britannique très surannée et codifiée. Du fait qu’il s’agit d’une bourgeoisie terrienne et très argentée, on a d’abord une impression de déconnexion par rapport à la « vraie » société, celle des « petites gens » – mais ça, c’est parce que moi, je ne viens pas de la haute bourgeoisie, je crois. Et puis, très vite, j’ai été conquise par le flegme britannique, par les bonnes manières, par la maturité de ces jeunes gens.


Hormis l’intérêt de la vie quotidienne d’une partie de la population britannique avant-guerre, j’ai aussi été passionnée par la façon dont, par petites touches, les protagonistes ont vécu l’avancée progressive mais inéluctable vers cette Seconde Guerre Mondiale – nécessairement d’un peu plus loin que nous autres, les continentaux. Le sentiment d’une seule nation où chacun, nanti et moins nanti, veut participer à sa façon à « l’effort de guerre », qui en apprenant à élever des poules et à se faire cuire un œuf, qui en s’engageant dans l’armée ou la Croix Rouge, etc. Et puis, nous vivons le quotidien de la guerre, pour ceux qui sont restés en Angleterre : Londres sous les bombardements, mais aussi la campagne britannique et ses rationnements. C’est aussi une approche très intéressante pour moi qui en connais surtout la vision franco-française. Enfin, si l’on a tendance à considérer que la guerre s’est finie en 1945, nous accompagnons Judith de l’autre côté du globe, là où ça continue…


J’ai adoré.

Juliette_Kalarosa
10

Créée

le 6 mai 2015

Critique lue 307 fois

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