Durant des années, l'auteur Mitchell Zuckoff s'est entretenu avec Robert Altman afin d'écrire un livre d'entretiens, mais il a pris une forme un peu différente à sa mort, survenue fin 2006. Sur l'initiative de sa femme, Kathryn Reed Altman, il a interrogé des dizaines de collaborateurs du réalisateur qui ont couru sur toute sa carrière, ainsi que sur des proches, ses enfants, ses ex-femmes, pour en faire un portrait global et exhaustif. Car on ne pouvait pas dire que le type était facile à vivre.


Originaire du Kansas, Altman est parti à la guerre à 18 ans comme copilote de bombardiers, et il a eu envie de travailler dans le cinéma une fois de retour au pays. Au départ acteur, il va coécrire un scénario pour Richard Fleischer, Bodyguard qui n'aura pas de suite ; alors, il retourne au Kansas, dans une boite de production locale où il va réaliser des dizaines de courts-métrages où son caractère explosif faisait déjà des siennes, et lui vaudront d'être viré six ans plus tard. Avec une troupe de comédiens de théatre de la ville, il va pouvoir réaliser son premier film, The delinquants, qui va être sa carte d'entrée à Hollywood pour réaliser des épisodes de série mais aussi des films plus oubliables comme Countdown. Mais le miracle va arriver en 1970 avec M.A.S.H., au départ un scénario rejeté par tout le monde et qui sera son plus gros succès, au point de lancer pour de bon sa carrière alors qu'il a déjà 45 ans. Mais on va dire qu'avec ce film, c'est le terreau pour le style Altman qui va être établi, avec une troupe chorale et une sensation d'anarchie qui en font des films très cohérents. S'en suivront encore 36 ans de carrière, jusqu'à l'apothéose The last show, ou une belle façon de conclure son parcours.


Le livre est émaillé de tas d'anecdotes de ceux qui l'ont connu, mettant en avant son caractère parfois difficile avec les studios, son intransigeance, le fait qu'il laissait tomber sa famille au profit des films, mais tous vantent sa direction d'acteurs hors du commun, qui fait que tout le monde voulait jouer avec lui, même si c'est pour des sommes modiques. A ce titre, pour The Player, c'est Altman lui-même qui a contacté les nombreuses guest-stars, qui ont toutes participé pour quelques centaines de dollars, juste pour le plaisir de collaborer avec le réalisateur, aussi bien Bruce Willis que Julia Roberts.

Long de près de 600 pages, le livre se lit avec régal, on ne s'arrête pas de le lire, car il est également d'une grande franchise. Et il fait regretter que les films de sa période plus sombre, celle des années 1980 où il était tricard auprès des grands studios après l'échec de Popeye, ne soient pas vraiment accessibles.


Bien des années après sa disparition, l'hommage qui lui a été rendu au Festival Lumière 2023 a été une belle façon de célébrer ce réalisateur hors-du-commun, dont je retiendrais surtout trois films ; Brewster McCloud (qui était son œuvre préférée de sa carrière), Le privé et Nashville, tous sortis dans les années 1970, sa grande période.

Boubakar
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le 13 nov. 2023

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