Devenir une salope éthique

Dernier livre en date de cet auteur qui étudie les pratiques culturelles contemporaines, Sex Friends retrace une réflexion sur ce paradoxe avec lequel nous devons vivre, et auquel la plupart d’entre nous aura du mal à échapper : il est possible, avec toutes les informations en circulation, de trouver la personne de nos rêves, la fameuse autre moitié dont nous tombons amoureux sur un coup de foudre. Et non seulement c’est possible, mais c’est en plus ce que se proposent de faire les applications de rencontre. Sauf que, plot twist, évidemment, ça ne fonctionne pas.
Et pour cause. Si les applications de rencontre fonctionnaient et nous aidaient à trouver véritablement l’âme sœur, alors elles se désertifieraient en un rien de temps. Pourquoi alors fonctionnent-elles si bien (ou mal, selon le point de vue). Pour de multiples raisons parmi lesquelles il y a, évidemment, le fait que nous oscillons constamment entre l’ennui et le manque, donc notre nature humaine si facilement corruptible. Et il est vrai que l’expérience des applications de rencontre fait tout pour nous amener vers un cercle vicieux, celui de la dépendance et de l’impossibilité de ne jamais être satisfait.
C’est un des aspects parmi tant d’autres du livre, mais c’est celui qui se retient le plus aisément. Bien plutôt que de faire un simple constat alarmiste, l’auteur propose une réflexion où il nous aide à comprendre la mécanique de cette technologie qui nous dépasse encore un peu (la géolocalisation, si précieuse pour ces applis et qui nous semble si naturelle n’a été introduite dans nos vies par Apple il y a 12 ans à peine !) et donne quelques pistes pour reprendre sa vie amoureuse (et sexuelle) en main (figurativement, pas littéralement). Sans rentrer dans les détails, c’est un livre de grande utilité pour les plus jeunes, à qui il s’adresse dans un style facile et ponctué de métaphores inventives. La Découverte, avec cet ouvrage, publie une étude audacieuse sur notre monde contemporain, non pas sous le regard critique de la sociologie, mais plutôt sous celui d’un philosophe des nouvelles technologies.