Partir avec Claudel dans la lecture, c'est comme partir en vacances une semaine : au début, la préparation est lente, on a pas envie de partir de chez soi.Puis, à la fin de la semaine, on s'attache vraiment à notre environnement. Mais on doit de nouveau partir.
Oui, Claudel est un itinérant qui nous fait voyager à travers de multiples pays. Le premier que j'ai exploré à ses côtés, la France de la Première Guerre mondiale, m'avait laissé la première fois mécontent. J'avais l'impression qu'on ne m'emmenait pas assez loin, que tout passait trop vite, que j'avais raté des trucs. J'ai relu une autre fois l'oeuvre, l'esprit mieux rodé à cette lecture. Mon mécontentement s'est effacé petit à petit, et j'ai su apprécier l'auteur à sa juste valeur. Néanmoins, ce n'est pas la peine de lui jeter des fleurs de partout, il a pas inventer l'eau chaude, et encore moins le principe des romans qui ne s'inscrivent dans aucun genre en particulier.
Après les Ames Grises, je sentais que j'étais passé à côté de quelque chose... Après un rapide passage en libraire pendant les vacances, je me suis procuré trois autres exemplaires des oeuvre de cet auteur meurthe-et-mosellan (Lorraine power !), je m'y suis remis.
Le Bruit des Trousseaux. Des anecdotes qui semblaient des images, comme un bêtisier mais où on ne rit pas. Des horreurs mises sur le même plan que les quelques petits éclats positifs que la vie à la prison peut avoir... Une réalité bien effrayante, alors que j'ignore si tout est vrai dans ce qu'il raconte. Un passé qu'il a pourtant vécu.
Enfin, dernière tentative en date : La petite fille de monsieur Lihn. Mon premier souci, avec ce livre, c'est que je n'ai pas envie de l'appeler roman, il ne mérite pas une telle appellation. Malgré sa longueur, il s'agit d'une longue nouvelle dont la chute, au final, montre au lecteur qu'il a vraiment été mené en bateau pendant près de 200 pages. L'absence de complexité dans la structure du récit m'empêche de lui donner l’appellation de "roman".
Alors, que dire ? Oh, le pauvre monsieur Lihn, exilé dans un pays dont il ne connaît ni le nom ni la langue ? Non, je ne pense pas. Derrière sa naïveté, l'auteur essaie de construire un récit qui se veut émouvant. Les personnages, toujours désignés par les mêmes qualificatifs, limitent le choix du vocabulaire et montrent le manque de réflexion du personnage principal. Mis à part cela, l'absence d'action m'empêche tout à fait de vous recommander ce livre. Je l'ai lu en connaissant la fin (peut-être mieux, en fait... mais je n'en dirais pas plus), cela m'a permis de poursuivre ma lecture jusqu'au bout (si je n'avais rien su, je pense que j'aurais abandonné tant ce livre dégouline de bons sentiments dans un monde pas si rose). On est bien loin du classique aux phrases complexes et enrichies de mots qui font du bien aux yeux. Un roman fade, mais alors, pourquoi une aussi grande note ? Peut-être parce que la fin, c'est vraiment là que tout l'auteur révèle ses capacités littéraires. Oui, j'ai vraiment senti, comme un électro-choc, que la fin se distingue tout à fait du reste du récit. Cela prouve à mes yeux que ce professeur d'écriture scénariste n'est pas du tout mauvais, que même s'il écrit des romans comme il écrit des scénarios, il peut faire bien mieux. Néanmoins, le reste du livre, comparé à la fin, ne vaut pas grand chose. Un peu comme si on posait longuement le décor. Cette lente progression n'a pas non plus été enrichissante. Dans les oeuvres telles que celle de Proust, chaque mot a sa place dans la phrase, et il brille dans cette phrase, comme un soleil ! Là, les mots s'enchaînent, formant des "petits mots", comme le dit si bien le juge Mierck. Je suis satisfait de ma lecture, mais encore déçu. Ce professeur doit bien avoir quelque chose dans le ventre, mais il se contente d'écrire des petits romans pour divertir et sans trop de sens. J'attends encore l'oeuvre qui viendra des tripes. Peut-être est-ce le Café de l'Excelsior. Je ne sais pas. Seul l'avenir me le dira, ainsi que mon parcours au côté de cet auteur contemporain qui peut faire mieux.