Malgré 35 ans de carrière et une voix reconnaissable entre mille, Mark Lanegan restait toutefois entouré d'une aura de mystère et de ténèbres aussi sombres que son univers. Auteur d'une chiée d'albums en solo/duo/trio/groupe/supergroupe, et d'une liste de collab aussi longue qu'improbable (ça va de Moby à Gérard Manset quand même), il n'a cependant jamais vraiment rencontré le succès, contrairement à plusieurs de ses potes.
Alors, je me doutais bien qu'il avait surement galéré pour en arriver là, et qu'au vu de ses lyrics dépressifs et de sa grande loquacité en concert, c'est surement pas un gai luron. Mais je ne m'attendais pourtant pas à un tel déluge de dégueulasseries en lisant son autobiographie.


Car ce livre est sacrément cru et Lanegan n'épargne aucun détail sordide à son lecteur. A la page 3, il a 12 ans et devient alcoolique, à la page 10 il a 18 ans et risque 18 mois de taule. Ça pose tout de suite l'ambiance. N'y cherchez pas de détails technique sur ses enregistrements, ses créations musicales ou sur la genèse de ses différents projets, il n'y en a quasiment pas. La musique, il la voyait surtout comme un moyen de quitter son bled paumé et de se taper des tonnes de gonzesses.


Dans ses mémoires, Lanegan raconte donc les tournées et ses excès, la drogue, l'amour, les bagarres, l'alcool, la violence, le sexe, la drogue et aussi la drogue. Il n'y occupe pas le beau rôle, il passe même pour un sacré connard, capable de toutes les entourloupes possibles pour baiser ou se shooter. La liste de gens qui ne veulent plus travailler avec lui est surement aussi longue que celle de ses collabs.
Complètement accro à l'héroïne, il survit financièrement en dealant hero et crack depuis son appart miteux, et c'est surtout ça qui ressort de ce Sing backwards and weep. Cette autobio est celle d'un dealer de bas étage, d'un rescapé d'une période du rock qui a essuyé pas mal de pertes (Kurt Cobain, Layne Staley, Jeffrey Lee Pierce, tous amis proches de Lanegan), d'un type coincé dans ses addictions qui cherche la lumière.


C'est bien écrit, viscéral, honnête, pathétique parfois, dur, dérangeant même, parfois trop. Je m'attendais à plus de musique et moins de trashtalk (le passage sur Gallagher m'a tout de même fait plaisir), et je suis un peu déçu sur ce point. J'aurais préféré savoir comment sont nés ses projets avec Isobel Campbell ou Soulsavers plutôt que de savoir qu'il avait déjà tenté de se piquer dans la teub. Mais soit, il a voulu raconter ses galères et ses tentatives d'en sortir c'est son choix. Ça reste toutefois un témoignage unique et poignant, un guide de survie en milieu grunge écrit par un dur à cuire.

adrock
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le 30 août 2020

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