Les deux font la paire

Suivre les péripéties de Leia ne m'attirait pas particulièrement mais la possibilité de mieux comprendre l'évolution des événements après la trilogie Aftermath de Wendig était tentante.
Nous découvrons la Nouvelle République 25 ans après la mort de Palpatine, empêtrée dans l'immobilisme de son sénat qui répète les erreurs passées. Une atmosphère douce-amère et crépusculaire domine, avec une Leia vieillissante mais encore adulée pour ses hauts-faits en grande partie fantasmés par la nouvelle génération. La princesse partage avec le lecteur ce regard distant sur un monde que l'on sait bientôt ravagé par le Premier Ordre. Elle est une populiste, en faveur de l'auto-détermination et de l'autonomie des mondes républicains, opposée aux centristes qui attendent beaucoup d'un pouvoir central fort et remilitarisé.
Puis une simple enquête en forme de dernière distraction avant la retraite pour Leia change tout. Elle est l'occasion de se fader l'agaçant jeune sénateur centriste Ransolm Casterfo et plutôt que d'étirer pendant des centaines de pages les chamailleries politiques entre le gamin idéaliste et la vétéran des guerres rebelles, on se retrouve avec un duo qui fonctionne très bien, plutôt subtil et touchant, chaque personnage offrant à l'autre la possibilité de questionner ses convictions. Le duo n'est pas sans rappeler Thane et Ciena de Lost Stars, par la même auteure, et leurs deux visions du rôle de l'Empire. C'est clairement cette relation qui porte le roman et le regard que Leia et Casterfo portent sur le passé.
Alternant entre les enjeux géopolitiques qui se négocient sur le nouveau monde capitale d'Hosnian Prime et les scènes d'action et infiltration très classiques, le roman mêle joyeux poncifs et approfondissements bienvenus avec le soupçon de recul et de maturité qui permet aux vieux routards de l'univers de s'y retrouver.
Bien ancrée dans le concret, riche de détails, l'investigation avance à petits pas et s'accélère puissamment à la fin du roman, expédiant sans doute un peu rapidement et aisément les révélations qui conduisent à connecter les éléments d'Aftermath et de l'épisode VII. Néanmoins, l'essentiel est là : la menace du Premier Ordre est révélée pour ceux qui en acceptent l'éventualité et composeront, afin de s'y opposer depuis les ombres, la Résistance. Rien que cela éclaircit l'étrangeté de la situation politique découverte au début de The Force Awakens et le rapport des forces en présence.

En bref, les éclaircissements bienvenus sur l'évolution politique de la galaxie et un très bon duo de personnages principaux compensent les quelques faiblesses de l'intrigue, notamment le caractère parfois artificiel des justifications liant cette histoire à celle du Premier Ordre et de la Résistance.