(Mi fiche de lecture mi critique, je fais ça pour moi)
Dany, estimé professeur d'économie à Harvard (ce qu'il ne manque pas de répéter à longueur de pages), new-keynésien, a un avis iconoclaste : le libre échange pur, forcément positif dans un monde parfait, peut ne pas être la solution idéale en raison de facteurs sociaux, politiques, ou plus simplement des limites humaines ...
En 250 pages environ il va nous dévoiler sa vision d'une économie mondiale fonctionnelle à travers quelques préceptes économiques puis politiques :
Sur le libre échange à proprement parler :
- Plus de libre échange crée plus de richesse (l'avantage comparatif de Ricardo), et il serait donc bête de s'en passer comme ça a été fait de manière catastrophique dans les années 30.
- Ces gains économiques généraux se font au prix d'un transfert des perdants aux gagnants de l'ouverture. Ces transferts prennent en importance relativement aux gains à mesure que le niveau d'ouverture augmente. Il avance, pour les états-unis contemporains, un facteur 50 entre transferts et gains (1€ de gains grâce au libre échange provoque 50€ de transferts au sein de l'économie du pays).
- Il est donc nécessaire, pour amortir les coûts sociaux de l'ouverture, d'avoir un état social fort. Il remarque ainsi que dans les pays développés, la place de l'état est d'autant plus forte que le commerce extérieur est important.
- Profiter, en terme de croissance, de l'ouverture, dépend également d'une multitudes d'autres facteurs, institutionnels notamment.
Sur la finance : le libre échange financier n'est pas équivalent au libre commerce. Potentiellement souhaitable ou nécessaire, il a cependant des effets déstabilisateurs très important qui peuvent remettre en cause la pertinence de son application totale.
Sur les pays en voie de développement et le consensus de washington
- Il faut privilégier une approche ad-hoc de renard (plein de petites idées) face à celle du hérisson (une grosse idée) aka les monétaristes sont des crétins monomaniaques. Responsabilité des économistes, tendant à jouer les prédicateurs "hérissons" dans le débat public même quand leurs travaux disent le contraire.
- Dès qu'on prend en compte le progrès technique endogène, les effets institutionnels, etc ... L'ouverture directe n'est pas adaptée mais un "chemin de développement" doit être créé. Exemple des dragons asiatiques.
Sur la politique :
- Triangle d'impossibilité politique : on ne peut pas avoir l'hyper mondialisation de l'OMC+traités, la démocratie (il emploie ce terme mais devrait parler en fait de souveraineté, la démocratie étant un des types de souveraineté possible) et les états en même temps, du coup plusieurs choix :
- Gouvernance mondiale démocratique : considérée comme inatteignable et pas forcément souhaitable.
- La cage dorée : états et hyper-mondialisation. Ce vers quoi on va ajd. Problème démocratique.
- Le neo-bretton woods : cadre international lâche, avec libre échange minimal imposé, surtout sur le commerce mais marge de manœuvre correcte : c'est ce qu'il défend.
Le tout donne un bouquin plutôt intéressant, bien que pas vraiment révolutionnaire (dans les deux sens). Le fait que ça sorte des départements d'économie d'Harvard est d'ailleurs plus intéressant que le propos en lui même.
On regrettera cependant la faiblesse des propositions politiques, assez peu creusées mis à part quelques pages sur comment gérer la Chine. Faut croire qu'un économiste sérieux ne peut s'aventurer à parler vraiment de politique.
PS : pas de version française. Ce livre traite d'économie mais de façon très vulgarisée. Si vous êtes capable de lire les pages économie de n'importe quel grand quotidien anglo-saxon, la lecture ne posera aucune difficulté. Après c'est loin d'être must-read à moins d'avoir un intérêt particulier pour le sujet.