Barroco tropical, le précédent roman de l'écrivain angolais José Eduardo Agualusa était foisonnant et singulièrement chaotique, tout empreint de réalisme magique. En s'inspirant d'un fait avéré -l'histoire d'une femme cloîtrée chez elle, à Luanda, pendant 30 ans à partir du jour de l'Indépendance-, le romancier peut de nouveau parler de l'histoire de son pays, avec la fiction qui vient au secours de la réalité, l'enrichit et la "poétise" avec le talent qu'on reconnait à l'auteur. A travers cette vieille dame, agoraphobe et effrayée par les actes de violence qui se déroulent sous les fenêtres de son appartement, Agualusa décrit une solitude, un enfermement mais aussi une volonté de survie avec un chien et des livres pour seuls compagnons. Mais la force du livre, même si l'on peut trouver le procédé parfois artificiel, est de raconter aussi le dehors, via des personnages pittoresques et au destin tourmenté dont la spirale infernale finit par les faire se rencontrer. J.E Agualusa alterne scènes d'intérieur et événements du monde extérieur. Et Ludo, la recluse, devient à son corps défendant une actrice, malgré une fausse passivité, de l'évolution d'un pays qui mettra près de trois décennies à sa remettre de sa jeune émancipation.