Le monde de la Fantasy est rempli de brutes écervelées (Jim Theis - The Eye of Argon), de pervers lubriques (John Norman - Gor) et de sinistres aventuriers (Lyon Sprague De Camp). Lin Carter faisait partie du clan de ce dernier, chargé de se faire du pognon avec les écrits d'un écrivain mort prématurément qu'ils ne connaissaient pas. Mais à force de publier des nouvelles inabouties de Robert Howard, de reprendre les brouillons de Howard pour en faire des nanars (La main de Nergal étant un chef d’œuvre humoristique), d'écrire n'importe quoi sur l'univers de Robert Howard (comme l'idée de faire de Conan un mercenaire du Royaume Turanien)... Lin Carter en eût marre. C'était décidé il allait faire son propre cycle et promis ce serait différent.
Son héros original serait un aventurier dans un univers dominé par la magie et les guerres incessantes, mercenaire venu du nord, demandant de la nourriture s'il est emprisonné au lieu de gueuler, ne croyant qu'en son épée et en son dieu Crom euh Gorm, etc. Il s'appelerait Thongor. Ce sera sa seule particularité.
Mais Carter devait continuer son effort intellectuel. Il lui fallait trouver un univers tout aussi original pour son héros original avant que son copain Sprague de Camp ne vende ces histoires en aventures de Conan. (Heureusement seule la nouvelle La chose dans la crypte connut ce douteux honneur). Après avoir piqué quelques noms de l'Âge Hyborien Carter trouva des vieux livres : Caspak, Pellucidar... Il vit que c'étaient des histoires de continents parallèles où cohabitaient les humains (gentils) et les reptiliens (méchants). Carter se dit que personne ne devait plus connaître leur auteur, un certain Edgar Rice Burroughs, et décida de reprendre son concept. C'est ainsi que fut créé le cycle de Thongor.
Le lecteur de cette critique pourra arguer qu'il s'agit "d'hommages" avec un minimum de renouveau. Ce sera sans doute car il n'aura pas lu le présent livre.
Tous les personnages semblent creux voir stupides :
- le sous Conan qui se fait capturer toutes les 40 pages, et ne peut s'évader que grâce à la présence fortuite d'un allié dans le coin.
- le garde disgracié et condamné à mort à cause de Thongor qui le prendra tellement bien qu'ils deviennent en une minute les meilleurs potes du monde
- le magicien tellement puissant qu'il se fait capturer comme un bleu à deux reprises sans possibilité de s'évader par lui-même
- les méchants qui veulent détruire la Terre, que notre héros va éliminer en trois pages (ça c'est de la fresque épique!) Et je ne parle pas des sbires qui trouvent toujours une excuse pour ne pas tuer Thongor lorsqu'ils le captureront assez facilement.
L'intrigue ressemble trop à un feuilleton improvisé (évasion d'une prison, dinosaure, histoire de reptiliens, royaume décadent, autre royaume décadent, montagne sacrée et repère des reptiliens) pour présenter un quelconque intérêt. Carter reprend la thématique de confrontation du barbare et du civilisé de Howard, mais avec la compréhension d'un gamin de 8 ans qui n'a lu que des Comics. Le civilisé est un méchant car il croit à un culte mauvais et ne respecte pas les paris sportifs (!)
Même aux fans de Sword and Sorcery je ne le conseillerai pas. Il me reste à prier que personne ne l'adapte au cinéma.