Parrainé par son compatriote Mario Vargas Llosa, Jeremias Gamboa s'est fait un nom dès la parution de son premier roman en Amérique Latine. Avec un tel pedigree et les compliments du Prix Nobel péruvien qui s'affichent sur la couverture du livre, l'on s'attend à quelque chose de flamboyant, dans le style du réalisme magique que l'on accole trop vite à toute littérature originaire d'Amérique du sud. Première surprise : Tout dire est un roman sans envolées lyriques, extrêmement bien écrit pourtant, avec une précision dans les mots employés qui rappelle que Gamboa a fait longuement ses classes dans le journalisme. Ce qui n'empêche pas l'ouvrage d'être éminemment littéraire, mais moins pour son écriture que pour ses thématiques qui renvoient sans discussion au genre "roman d'apprentissage." Le héros de Jeremias Gamboa s'appelle Gabriel Lisboa, est diplômé en communication de l'université de Lima, a travaillé comme journaliste puis éditeur. Comme l'auteur du livre ? Oui. Alors, autobiographie ? Sans doute, en très grande partie. Mais peu importe, ce qui compte, c'est la réussite totale d'un univers romanesque admirablement dessiné et la profondeur et la complexité du personnage de Lisboa. Le livre conte dix ans de sa vie, de 20 à 30 ans, grosso modo, de ses premières armes de journaliste à la fonction d'éditeur d'un grand hebdomadaire d'actualités péruvien. La seconde partie du roman est davantage axé sur sa vie sentimentale et elle est toute aussi passionnante que la première, tout en tourments psychologiques et interrogations sur ce thème universel : que faire de sa vie ? Trois fils rouges constituent cependant la trame de Tout dire : la rage et la difficulté de devenir un écrivain, l'amitié, véritable bouée de secours pour temps de déprimes, la ville de Lima, ses quartiers déshérités, ses bars obscurs et sa vitalité. Impossible, quel que soit son âge, de ne pas s'identifier peu ou prou à Gabriel Lisboa, à ses rêves, ses chimères et ses désillusions. De ses moments d'euphorie à ses instants de doute, ce personnage nous prend par la main et ne nous lâche plus pendant plus de 500 pages.

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le 17 déc. 2016

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