Ça commence par des regard mi-clos, et donc mi-ouverts...:
“The passerby had their eyes half-closed. Everyone whole generations wore his mask. Children greeted each other with mask painted on their faces; they smiled at each other's smiles growing in this emptiness, wanting to, guiding our resemble the reflections, whole generations had fallen asleep.” (incipit)
Les arbres, c'est cool. C'est beau, et puis on en fait du papier pour faire des livres, parfois même de bons livres, donc le crime est justifié. Quand on tue un arbre pour imprimer un Marc Levy ou un 50 Shades of Grey, c'est criminel. Forcément. Et puis, il faut penser aux oiseaux qui avaient élu domicile dans cet arbre. On n'en parle pas assez des oiseaux délocalisés, hein, des écureuils et de leurs réserves de noisettes pour faire du Milka et du Nutella... Après, déménager, c'est bien aussi, il faut changer d'air... Tout ça pour dire, les arbres, c'est bien et les arbres font partie d'un cycle, avec une destinée, tout ça. Et selon un bon karma arbrique, un arbre peut finir en exemplaire de Tree of Codes.
Alors, Tree of Codes, c'est un die-cut book, mais surtout, Tree of Codes est une expérience de lecture, et ce même si elle dure une demi-heure (ça prend plus longtemps je pense pour couper un gros arbre plein d'écureuils). À l’ère des iPad, des Kindle et autres objets de lecture numérique diaboliques (après, c'est mieux de lire une liseuse dans le métro que de jouer à Candy fucking Crush, am I right?), Jonathan Safran Foer impose tout d'abord l’hégémonie du papier et justifie le génocide des arbres (pour qu'ils repoussent mieux après) et on ne peut que féliciter la maison d’édition d’avoir suivi et publier ce merveilleux objet littéraire. Et pour parler code, disons que ce livre questionne l'expérience même de lecture, d'être lecteur.
À l'image du titre "Tree of Codes" issu de "Street of Crocodiles", JSF a coupé dans le texte d'origine pour construire sa propre histoire et plonger son lecteur dans un monde surréaliste, poétique, onirique où temps et espace se brouillent, au milieu de l'ennui du monde, du vide de l'air et des masques peints. Le corps de l'histoire habite un autre corps, qui selon JSF habitait encore un autre. Les histoires naissent, comme exhumées d'une magie, celle, éternelle, des mots, et peut-être d'un secret à jamais perdu. JSF n'offre pas seulement une performance, ou encore un cri passionné pour un livre, pour les livres, non, il catalyse le rôle actif de lecteur, et c'est ça le code. À mon sens... Je m'explique: Après la lecture d'un livre, seuls quelques fragments restent attachés au lecteur, et ces fragments diffèrent selon la vie, la sensibilité, la personnalité du lecteur... Chaque individu retire une expérience unique, une interprétation personnelle d'une œuvre. Chaque individu retire une histoire de toutes les histoires qu'il lit. Chaque individu fait inconsciemment un die-cut book. Tree of Codes, à sa façon, parle de cela, surtout de cela. D'être lecteur. C'est quasiment méta, en fait! Et puis lire sur du papier, eh bien, c'est mieux. Les arbres ça repousse, et si on décode le code, leur mort n'aura pas été vaine. Non, ne vivons pas sur une terre vaine.
“Only now do I understand the war against boredom, the lost cause of empty hours, of empty days and nights.”