"Je ne sais pas pourquoi [...] on dirait que vous vous êtes rencontrés, tous les deux"

Louis, étudiant qui cherche sa voie en changeant de cursus universitaire comme de chemise décide d'abandonner ses études pour répondre à une petite annonce : "Recherche jeune homme motivé pour s'occuper d'un adolescent singulier en séjour avec sa mère à Horville (Calvados)". Il ne sait pas pourquoi cette annonce l'attire, il ne sait pas pourquoi il accepte, lui qui n'est pas passionné de psychologie, n'a aucune vocation de soignant. Lui qui ne s'est jamais vraiment intéressé aux autres, préférant ses livres à la compagnie de ses semblables. Peut-être les termes. Peut-être le lieu. Ce lieu.

Horville est l'endroit où Louis passait ses vacances lorsqu'il était enfant. La nostalgie l'attire, les souvenirs des jeux, des promenades, des découvertes de la période magique de l'enfance. Rapidement, la nostalgie deviendra fantômes, ombres, ce qui remonte n'est pas toujours agréable. Aussi étrange que cela puisse paraître, c'est la relation que Louis va nouer avec Iannis, l'adolescent singulier, qui va l'aider à affronter ses fantômes.

Iannis. Iannis ne parle pas, ne mange pas de viande parce qu'il a l'impression de se manger lui-même, marche de façon déséquilibrée en agitant les bras. Iannis ne sait pas lire ou écrire. Iannis ne regarde pas les gens ne prend pas la main, fuit les contacts. Pourtant, assez facilement, il prendra la main de Louis. Et avec lui s'établira une vraie relation, aussi étrange soit-elle. Louis a l'impression que le garçon est une sorte d'éponge à émotions, qu'il ressent et comprend plus que ce qu'il n'en a l'air. Et lorsqu'on suit leur évolution parallèle, on se demande presque lequel des deux est désigné par le titre "un garçon singulier".

Il y a Helena, aussi. La mère du garçon que Louis ne parvient jamais à cerner vraiment, avec qui il a l'impression de se faire manipuler. Elle lui en demande beaucoup, sans doute trop, le laissant se débrouiller avec Iannis dès le premier jour avec pour seul conseil : "Oui, bien sûr, [il y a des précautions à prendre], mais on ne peut les prévoir : ce qui l'amuse un jour peut le terrifier le lendemain". Elle se décharge complètement sur le jeune homme, semblant abandonner son fils qu'elle ne parvient pas à comprendre. Pour autant, il est impossible de dire qu'elle ne l'aime pas.

Une écriture qui décrit tout en simplicité la difficulté de la différence, le développement des relations. Une écriture qui ne nous épargne pas non plus les moments pénibles, ce qui semble sublimer les moments d'apaisement.

"La vision des cheveux emmêlés du jeune garçon, du pli soucieux qui creusait son front m'apaisa. Ainsi plongé dans le sommeil, il ressemblait à tous les adolescents de son âge, il en avait la grâce et la fragilité. A son réveil, il aurait pu me saluer gaiement, sauter sur ses pieds pour me proposer une randonnée dans la campagne ou une partie de volley sur la plage. Au lieu de cela il allait se mordre les mains, se balancer et laisser errer son regard vide sur un monde qui lui échappait. Et c'est l'idée de ce désastre qui me fit me pencher vers Iannis et lui déposer un baiser sur le front."
Nomenale
8
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le 29 mai 2013

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