Londres 1888. Celui qu’on surnomme Jack l’éventreur sévit déjà dans les rues sombres de Whitechapel. Seulement voilà : des troncs de femmes atrocement mutilés sont retrouvés près de la Tamise et le mode opératoire diffère. Se pourrait-il qu’un autre tueur en série rôde dans la capitale londonienne? En tous cas Thomas Bond, médecin légiste en est persuadé. Insomniaque de son état, il erre tous les soirs dans les bas-fonds de la capitale pour trouver la paix dans des fumeries d’opium. Au travers des volutes de fumée il distingue un homme qui semble rechercher sa prochaine victime. Serait-il celui qu’il cherche ? Va alors s’en suivre une traque qui le mènera dans un monde qu’il était loin de soupçonner.
Loin d’un énième roman sur Jack l’éventreur Whitechapel entraîne son lecteur dans un polar teinté de fantastique et d’horreur. L’auteur n’est pas avare en détails pour décrire les atrocités subies par les victimes. Mais cela ne se retrouve pas que dans la description des meurtres. Sarah Pinborough retranscrit à merveille le Londres de la fin du XIXème siècle. Roman très documenté, le lecteur y retrouvera la vérité des bas-fonds de la capitale relaté par Jack London en 1902 dans « le peuple d’en bas » véritable reportage en immersion dans l’East End qu’il qualifie d’ « enfer humain ». Et ce roman en est l’illustration parfaite. On ne se promène pas dans les rues de Whitechapel, on essaie juste d’en sortir vivant. Misère, violence, prostitution, drogue, immondices, on est loin des soirées mondaines victoriennes. Cela donne encore plus d’épaisseur au récit qui se construit avec la voix de Thomas Bond avant de rebondir sur des flash-back à la troisième personne pour nous narrer entre autre l’histoire de ce petit garçon polonais Aaron Kosminski qui fait des rêves prémonitoires effrayants. Si vous êtes des fans de l’histoire de Jack l’éventreur ce nom vous dira quelque chose. Pour les autres, sachez que comme Thomas Bond, ce personnage a bel et bien existé : il fut l’un des suspects de Scotland Yard au moment de l’affaire. Juif polonais il avait dû fuir les pogroms russes. La matière historique tisse donc la toile de fonds du roman de Sara Pinborough. Grâce à ce socle ancré dans la réalité, l’auteur conditionne le lecteur à accepter tout ce qui se passe. lorsque le récit glisse dans un fantastique teinté de gothique, cela se fait de façon imperceptible et c’est ce qui fait toute la force de ce roman.