Certes, "A l'est de la vie" n'est pas l'un des romans majeurs de Brian Aldiss, grand humaniste et bambocheur devant l'éternel, écrivain de SF majeur de son état, et qui nous a quitté, à l'âge canonique de 92 ans, au mois d'août dernier. Mais voilà, si c'est un roman un peu décousu, voire émietté, il n'est pas - à mes yeux du moins - sans qualités.


Il s'agit d'un roman d'anticipation, écrit au début des années 90, au moment de l'effondrement de l'URSS, et dont l'action se déroule peu ou prou à notre époque, c'est à dire environ 25 ans après. Aldiss nous amène successivement en Géorgie et au Turkménistan, et il faut reconnaître qu'il a fort bien anticipé ce que deviendraient ces contrées du Caucase et d'Asie Centrale. Inutile de vous faire dessein : mafias, montée des nationalismes sur fond de religion et massacres à la chaine. L'un des personnages secondaires tient d'ailleurs à la fin du roman un discours assez étonnant quant au fait que l'Union Soviétique avait apporté, en l'imposant, une forme de paix et de stabilité, en mettant tout cela sous l'éteignoir pendant plusieurs décennies. Ensuite, Aldiss a manifestement voyagé lui-même dans ces coins reculés de l'Asie, ce qui fait que les deux passages assez long, qui se déroulent d'abord en Géorgie puis au Turkménistan donc, sont assez réussis et vivants, ce jusqu'aux descriptions qu'on peut lire de leurs paysages urbains, ruraux et montagnards.


Le bouquin comporte en outre, entre ces deux expéditions en Asie, des espèces d'interludes durant lesquels le personnage principal Roy Burnell, qui est anglais, se retrouve en Europe occidentale. Là encore, l'auteur a fait preuve de beaucoup de flair : sa description de la ville de Francfort et de son immense banlieue pour gens aisés, moderne et lénifiante, fait mouche. Beaucoup d'humour également dans la façon de nous faire vivre le milieu dans lequel évolue Burnell : des hauts fonctionnaires européens, chargés de la conservation du patrimoine culturel. Des gens cultivés et veules, que l'auteur nous présente par petites touches, sous une plume légère derrière laquelle on devine une féroce ironie. Burnell himself, anglais issu d'un milieu fortuné est particulièrement croustillant.


Enfin, le dernier aspect du roman est plus intimiste, introspectif et si le propos emprunte au genre de la S.F (Burnell se faisant voler, dans sa mémoire, ses dix dernières années de souvenirs), il prend souvent la direction de réflexions sur la vie, les souvenirs et la façon dont ceux-ci construisent une personne. Par exemple, sur un mode "on efface tout et on recommence", pourrait-on reprendre à zéro une histoire d'amour ratée ? Aldiss avait presque 70 ans quand il a écrit "A l'est de la vie" et je me plais croire qu'il y livre un peu de son histoire personnelle, voire de ses regrets. Alors, évidemment parfois, ça a un petit côté vieux sage qui vous parle de la vie...De là à dire qu'il radote, non : car il vous parle de la vie avec beaucoup d'humour et de finesse. Mais ça casse quand même un peu le rythme.


Tout ça nous fait un bouquin attachant, et parfois un tout petit peu dispersé !

Marcus31
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le 8 oct. 2017

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