1. Les Goodenough, originaires du Connecticut, font partie de ces pionniers partis s’installer vers l’Ouest pour y cultiver les terres, et ont fini dans l’Ohio. Mais les conditions de vie dans le Black Swamp et ses marais sont épouvantables, et chaque année le père, James, creuse une nouvelle tombe pour l’un de ses enfants qui a succombé à la fièvre, tandis que Sadie, la mère, sombre dans l’alcoolisme et la folie, ne semblant survivre que pour mener la guerre à ces pommes devenues ses ennemies ou attendre la visite de John Chapman, vendeur itinérant. Les récoltes sont soumises aux aléas du temps et de la botanique, et la passion exclusive de James pour ses fruits, son obsession pour la greffe et la création de nouvelles espèces n’y changent rien, le drame est imminent.
    Des années plus tard, Robert, l’un des fils, est parti jusqu’en Californie et y a fait à peu près tous les métiers itinérants (de chercheur d’or à garçon de ferme). La découverte de Calaveras Grove et des séquoias géants de Californie, ainsi que sa rencontre avec William Lobb, un exportateur d’arbres chargé de fournir les pépiniéristes de Grande-Bretagne, vont le pousser à renouer avec la passion des arbres léguée par son père.


Etrange d’imaginer que des arbres puissent pousser des hommes à la passion et à la folie. C’est pourtant bien ce que raconte ce nouveau roman de Tracy Chevalier, et il fallait au moins son talent (et celui de la traduction, chapeau bas !) pour arriver à passer tant d’émotions autour d’une simple pomme ou d’un tronc de séquoia géant.
Après Prodigieuses Créatures ou La Dernière Fugitive, Tracy Chevalier m’a à nouveau éblouie avec une écriture réaliste qui prend aux tripes. La première partie est vraiment saisissante : la guerre que se mènent James et Sadie est cruelle, ainsi que le peu de cas qui est fait de leurs dix enfants, mais la vie était ainsi à une époque où la misère règnait en maître et où la bataille contre la nature était sans pitié.


Pour les cultivateurs comme pour les explorateurs, les arbres valent de l’or, et même le choix entre pomme de table et pomme à cidre devient un enjeu vital quand la survie d’une famille entière en dépend ; pour nous lecteurs ils symbolisent un monde en mutation et une population en mouvement. Dans cet épisode particulier et dur de la conquête de l’ouest américain (où personnages réels et fictifs sont habilement mêlés), l’espoir n’est pas non plus absent, et peut prendre des formes aussi variées que le sourire d’une femme, l’apparition d’une baleine, les retrouvailles avec une soeur ou la saveur subtile d’une pomme au goût d’ananas. C’est beau, c’est cruel, c’est passionnant.


https://cestquoicebazar.wordpress.com/2016/05/24/a-loree-du-verger-coup-de-%E2%99%A5/

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le 24 mai 2016

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