Aucune eau chaude ou eau bénite dans ces ablutions qui nous sont livrées par Patrick de Witt avec force détails, dans ce premier roman paru en France en 2009, et portant le modeste sous-titre « Notes pour un roman ».
Ablutions – ou les vignettes du barman d'un bar glauque de Los Angeles - ruisselle le whisky par tous les pores. On y croise les habitués du bar, un défilé impressionnant d'individus cabossés, imbibés d'alcool et de poudre blanche, les lendemains difficiles du barman alcoolique qui engloutit des tubes entiers d'aspirine pour soigner ses gueules de bois, des rencontres féminines assez éloignées d'un rêve hollywoodien, un détour par le Grand Canyon et Las Vegas, et au final le chemin détourné qui va le mener vers une vie différente.
Il paraît que Patrick de Witt a été barman pendant six ans. C'était peut-être un boulot de merde. Il en a fait un grand livre, que ses illustres prédécesseurs Bukowski ou Hunter Thompson n'auraient certainement pas renié.
« Monty a trente ans et ne se lave pas ; ses lunettes sont rafistolées avec du scotch, et les poignets de son élégant manteau en velours grenat sont sales ; il dégage l'effluve psychique typique de celui qui a vécu dans des hôtels de passe et des hôpitaux psychiatriques. Il fait volontiers la conversation mais ses sujets se limitent à l'alcool et au cinéma, ses deux obsessions et raisons d'être. »
« Un soir, pour des raisons rendues obscures par le whisky, tu prends de la cocaïne. Tu n'en sniffes qu'une petite quantité mais la drogue te prend sous son emprise et bientôt il est quatre heures du matin et tu palpites comme un poisson hors de l'eau, grinçant des dents en attendant ton tour pour prendre la parole. Vous êtes dix autour d'un cercle, tout le monde veut parler et personne ne s'intéresse à ce que raconte celui qui est en train de s'exprimer. L'un se met à pleurer parce qu'il a subi des agressions sexuelles dans son enfance, l'autre parce qu'il a perdu sa mère, un troisième voudrait aller à Las Vegas. Tu sors en douce par la porte latérale et te diriges vers ta voiture. Il est cinq heures et demie du matin et le ciel a la couleur d'un bleu vieux de trois jours. C'est beau. »
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