La Galice jusqu'à l'hallali
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Quiconque vénère depuis longtemps la littérature indienne et ses romans foisonnants, écrits par Seth, Ghosh, Adiga, Mistry (liste loin d'être exhaustive), et dignes des grands auteurs russes du XIXe siècle, ne peut qu'être alléché par le résumé de Age of Vice de Deepti Kapoor. Et effectivement, la première partie du livre, qui, après une entrée en matière fulgurante, raconte en flashback l'histoire d'Ajay, garçon pauvre vendu durant son enfance et devenu le factotum d'un riche héritier, est assez éblouissante. Après cela, l'ouvrage part un peu dans tous les sens, s'attardant tour à tour sur le maître d'Ajay et une journaliste fascinée par le susdit, entraînée dans l'enfer de sa dérive existentielle. On a dans Age of Vice toutes les caractéristiques attendues d'un roman indien contemporain, reflet d'une réalité exacerbée du grand écart entre la misère des masses et l'aisance éhontée des nantis, des sans foi ni loi, qui ont bâti leur insolent pouvoir sur le meurtre et la corruption. Pour décrire ce microcosme pourri, l'autrice ne lésine sur rien et surtout pas sur la violence et la débauche, dans un océan de whisky et de cocaïne. Elle multiplie les personnages de second plan, sans nous perdre tout à fait, mais pas loin, et si son but est de nous inspirer du dégoût, elle y parvient sans mal. Les phrases courtes sont efficaces, les dialogues lapidaires aussi, mais il y a cette impression de trop plein qui vient assez vite et qui ne fait que s'amplifier. On en viendrait presque à se désintéresser des protagonistes principaux, hormis Ajay, qui bien que pas très moral lui non plus, reste le seul a à peu près conserver un visage humain. Age of Vice cherche à nous maintenir en tension permanente et à nous violenter ad nauseam mais le livre aurait sans doute gagné à ne pas être en surchauffe permanente et à accorder au lecteur estourbi quelques oasis de tranquillité, dans cette déferlante sauvage et inextinguible.
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Créée
le 16 févr. 2023
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