De Demis Roussos à la Neo-Geo, une biographie au poil.

Julien Chièze, rédacteur en chef de Gameblog, a décidé de consacrer une biographie à Alain Huygues Lacour (dit AHL), l'homme à l'origine de l'âge d'or de la presse vidéoludique (soit la décennie 90 et le début des années 2000), et au parcours ô combien singulier.

Au départ, passionné par la musique, et Hippie revendiqué, il a travaillé dans le secteur musical et nous narre ses rencontres avec Sergio Leone, Ennio Morricone, Serge Gainsbourg, Mireille Mathieu ou Demi Roussos, pour qui il sera assistant. Durant plus de quinze ans, il aura connu plusieurs postes, jusqu'à devenir producteur. Mais la lassitude venant, et plusieurs opportunités manquées (dont la découverte des Forbans), AHL va se consacrer à une deuxième carrière, celle pour laquelle on le connait aujourd'hui ; les jeux vidéo.
En effet, passionné de longue date par ces étranges objets venus d'ailleurs, il décide, à 41 ans, de stopper sa carrière dans la musique pour bifurquer dans une toute autre voie et devenir rédacteur chez Tilt, le premier magazine français parlant des jeux vidéo.

Son parcours est ainsi relaté avec franchise, de ses frictions avec le rédacteur en chef de Tilt à son arrivée chez Consoles + sur une période de 10 ans où il assistera à la naissance de la Super Nintendo, de la Megadrive, des consoles portables, et de la génération 32/128 bits, pour finir sur une note un peu désabusée où, une nouvelle direction arrivant à la tête du magazine, on le priera de prendre la porte sous prétexte qu'il fut trop vieux.

Je connais très bien AHL pour l'avoir suivi durant son parcours chez Tilt, puis Joystick et Consoles +, où je me rappelle encore de ses "tu le crois, ça ?" ou des trombinoscopes. C'est lui qui a aussi instauré cette espèce de starification des rédacteurs en leur proposant des pseudos, ou de mettre leurs photos dans les magazines. Et de voir une telle carrière (scindée en deux parties), et une telle passion pour les jeux vidéo à plus de 60 ans, ça laisse quelque peu rêveur.

Pour ce livre, Chièze a laissé parler AHL, sans lui porter une seule fois la contradiction, et où le style de ce dernier est bien retranscrit. Par contre, je suis moins fan des petits apartés, qui sont des réflexions sur le jeu vidéo d’aujourd’hui. La position actuelle de AHL (il est retraité) lui permet d'être assez franc sur son parcours, ses erreurs, et n'hésite pas à critiquer certains de ses confrères, en les citant, et revient aussi sur sa vie privée, surtout du temps de sa carrière dans la musique.

Le livre est accompagné de deux dvd revenant sur ses émissions sur Gameblog, Les histoires du jeu vidéo, mais si ça reste intéressant, tout le reste me parait être une gigantesque publicité pour le site, hormis une visite intéressante du site de Mo5, l'association référence sur le patrimoine vidéoludique.

Je ne veux pas trop dévoiler les anecdotes qui parsème ce livre, mais au fond, une interview carrière (audio ou vidéo) n'aurait pas été plus intéressante ? Car l'ouvrage est peu épais (moins de 200 pages avec pas mal d'espace vierges et en gros caractères) et donc se lit très vite. De plus, malgré toute l'estime que je porte à AHL, combien de gens vont être concernés par ce livre ? Les connaisseurs de Gameblog ? Les trentenaires/quarantenaires qui ont connu les jeux vidéo à partir des années 80 ?
Malgré son indéniable qualité (AHL a un talent de conteur), il en ressort une certaine frustration en se disant qu'on aurait pu aller encore plus loin.