Ce jeune monarchiste maurrassien, apprenti journaliste, est abattu par l'armistice signé par Pétain et rentre en Résistance. L'entrée en matière a de quoi faire frémir. Cet extrêmiste, porté par son patriotisme, quitte Pau et débarque pour Londres retrouver De Gaulle. Il devient secrétaire et a la lourde tâche de transmettre câbles et messages, ce qui constitue une fonction lourde de charges et hautement source à erreurs fatales. L'essentiel de sa mission est opérée à Lyon, avec un passage à Paris, sous l'autorité de Rex, dont il ne connaît pas le vrai nom, mais dont il mesure, dès le départ, le poids dans le mouvement, l'importance qu'il prend et les frictions relationnelles qui finissent par lui devenir fatales, puisqu'il se fait arrêter à Caluire. Si vous avez quelques réminiscences minimales de l'histoire de cette époque, ou si vous avez l'idée de jeter un oeil sur le tableau de concordance entre noms et pseudonymes, vous trouvez assez vite qui est Rex.
L'épopée dramatique de ce personnage côtoyé de prêt vaut le détour et mérite de surmonter les frissons de départ, quand on découvre les idées du narrateur. Son histoire à lui n'est pas non plus dénuée d'intérêt : il est condamné à évoluer idéologiquement, abandonnant Pétain et Maurras, les délogeant de son panthéon personnel. Son antisémitisme tombe et se regarde rétrospectivement de manière amère. Les risques qu'il encourt, ses réactions, tantôt fines et juvéniles, font frémir de diverses façons. Les intrigues de pouvoir au sein de la Résistance, les dangers imminents sont retracés en temps réel, ce que permet la retranscription de ce qui est formellement un journal.
Ce témoignage s'avère évidemment crucial. Il faut arriver à vaincre l'austérité et les barrières premières du récit, puis cette auto-biographie se transforme en polar amer, qui a finalement pour but, avoué et clair, de rendre hommage au héros pour qui il a travaillé, dont il ne connaît l'identité qu'après sa mort.