American Gods est un curieux roman pour lecteurs curieux...
L'auteur prend un malin plaisir à jouer avec l'intrigue, nos attentes de lecteurs, créant parfois de la frustration en laissant un fil de côté, pour revenir le coudre à un autre bien plus tard.
L'histoire est constituée de plusieurs pelotes de laine qu'il faut dérouler, certaines mènent à l'intrigue principale, d'autres nous content une mythologie inventée, à base de dieux vivant chez nous, dans le monde moderne, confrontés à des problèmes bien terre à terre (le djinn chauffeur de taxi...) d'autres pelotes encore, ne mènent à rien.
Roman foutraque, patchwork cousu main, American Gods se fait tour à tour road-movie (on peut dire road-book ?), chronique de l'Amérique profonde, fresque heroic-fantasy teintée de science-fiction, romance horrifique (Laura...) ou carrément polar enneigé à rebondissements.
Le héros, Ombre, ex-taulard presque jamais décrit physiquement, semble errer, se souciant peu de son destin ou de la réussite de son entreprise.
Percuté comme une bille de flipper par des personnages qui lui confient leurs quêtes en même temps que leurs états d'âme, Ombre s’acquitte de ses tâches, semblant voguer au gré des vents de l'aléatoire, guidé par le mystérieux Voyageur.
Cet employeur, ce mentor facétieux rompu à l’esbroufe, est un arnaqueur à la petite semaine (ahh la technique du violon...) qui semble être occupé à réunir les énergies dispatchées dans tous les USA, afin de préparer une grande et épique bataille terminale...
On lit parfois sans savoir pourquoi on lit, juste pour le plaisir de voir où tout cela va mener, et même si rien ne se passe comme prévu, on n'est pas déçu une seule seconde.
Cette belle idée (les dieux vivent parmi nous et ont les mêmes besoins que nous, si peu aimés qu'ils frisent la psychopathie...) est exploitée dans toutes ses facettes par Neil Gaiman dans une aventure qu'on n'oublie pas, et qui mérite une deuxième lecture (rien que pour la partie polar, totalement jouissive !).
Il paraît qu'ils vont en faire une série. On verra si les personnages nous parlent à travers l'écran...