Cocktail Malakoff
Benjamin Malaussène est un personnage récurrent des romans de Pennac. Il endosse un rôle patriarcal dans son étrange famille, veillant sur ses frères et sœurs cadets. Leur mère a l'habitude de...
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le 18 déc. 2011
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Un bouc-émissaire, non content d’endosser l’ire des clients d’un grand magasin parisien, semble vouloir attirer à lui des bombes qui n’en finissent pas d’exploser. Asseyez-vous entre les frères et sœurs de Benjamin Malaussène (ledit bouc-émissaire) pour qu’il vous raconte cette histoire.
Attention, critique à quasi sens unique…
J’ai l’habitude de lire dans les transports : « au bonheur des ogres » n’a pas dérogé à la règle. C’est, cependant, la première fois que quelqu’un m’adresse la parole en raison du livre que j’ai dans les mains. « Vous avez de la chance de lire Pennac » me lança cette personne.
A la réflexion, c’est en effet bien heureux que Daniel Pennac ait écrit ce roman. Il s’en dégage un agréable et vivace parfum d’humanité, alors même qu’il nous plonge dans un environnement qu’on sait très aliénant : un supermarché, Paris, notre société (dans sa version années 90). Le réconfort, on le trouve aux mêmes endroits que le protagoniste : chez son ami Théo et ses ami.es brésilien.nes du bois de Vincennes ; chez Stojil et son échiquier ; auprès de l’ami Amar ; auprès de tante Julia et de ses infinies théories…
Plus précisément, ces rencontres nous tirent de la morosité (et ce malgré les bombes et l’atroce passé de leurs poseurs) grâce à l’humour du protagoniste (le Benjamin Malaussène, dit « Ben »). C’est un humour de plaisantin, d’irrévérencieux, d’autodérision, de rire jaune, un humour noir. Un humour salvateur, nécessaire pour le protagoniste, grisant pour le lecteur ou la lectrice. Bref, on se marre bien, malgré les malheurs (parfois terribles, parfois légers) qui s’enchaînent.
Ben n’est pas seulement bouc-émissaire pour les frais de l’histoire. Il endosse aussi le rôle pour le lecteur (sa générosité est sans faille, malgré lui). Il nous livre ce récit avec tous les avantages du narrateur qui n’écrit pas vraiment au présent : l’action est constamment commentée des traits d’humour de Ben. On pourrait parfois en douter quand l’histoire accélère : Ben se retrouve parfois dépourvu, n’ayant que son humour pour expliquer à la police qu’il ne pose pas des bombes, et ses jambes pour rentrer à Belleville s’occuper de ses frères et sœurs. Pourtant les nombreuses digressions nous rappellent qu'on vit bien à travers Ben, et que c'est grâce à lui que le récit est si (au choix) loufoque, plaisant, dynamique.
Le thème du bouc-émissaire est bien tracé de bout en bout. Celui des « ogres » est plus discret au début, difficile à cerner. Chapitre après chapitre il gagne en consistance jusqu’à, finalement, nous rappeler que cette aventure, en apparence bon-enfant, repose sur l’atrocité des « ogres » (trigger warning à signifier ici, tout de même).
Les contours des dialogues oscillent entre un discours direct tranchant, ou un discours rapporté plein de métaphore. Transformant le réel avec une rare et légère poésie.
Créée
le 2 juil. 2022
Critique lue 6 fois
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