Aussi passionnant et émouvant qu'un manuel d'utilisation
On est typiquement devant le genre de roman auquel je n'adhère pas du tout. Tout est basé sur l'expérience personnelle, et est donc subjectif, l'histoire est banale mais l'auteure tient là un concept! Pour certains, c'est suffisant, le concept faisant du roman une performance artistique... Pour moi c'est surtout un prétexte à fournir une oeuvre proche de la branlette intellectuelle et assez vide de sens.
L'histoire est universelle (enfin il faut tout de même être une femme pour se sentir concernée) et ne mérite pas que l'on écrive 240 pages là dessus. La narratrice est une femme qui tout le long de sa vie nous explique les changements qui s'opèrent en elle du point de vue de son corps. Le lecteur assiste donc aux grandes étapes de sa vie: l'enfance, l'adolescence, la découverte de la sexualité, la maternité, le vieillissement...
Je me suis retrouvée dans certains passages, toutes les femmes se retrouveront dans certains passages... Ce que je reproche à cet ouvrage c'est d'être plus un "manuel d'utilisation" qu'un roman. Brigitte Giraud a choisi un ton détaché et le personnage principal est quasiment déshumanisé, ce qui empêche toute empathie aux lecteurs. "Le corps ceci... Le corps cela..." Les choses ne sont pas aussi simples dans la vie, certes il y a la biologie, les réactions physiques, mais il y a aussi la psychologie et ici l'accent est mis sur la première approche.
Le corps, l'homme, l'enfant... Il n'y a pas de prénoms, pas d'accroches, pas d'attaches. Les pages s'enchaînent, vous pouvez sauter des paragraphes entier, vous ne manquerez rien de crucial. La vie défile de manière clinique et plate... C'est dommage que Brigitte Giraud ait eu l'idée avant moi (et avant vous lectrices) parce que décrire froidement ses premières règles, ses premiers émois amoureux, ses jeux d'enfants, c'est à la portée de tout le monde. Par contre, j'aurai vraiment préféré qu'elle s'abstienne en ce qui concerne la grossesse... Oui, vraiment...
Certains aimeront ce roman. Ca fait bien d'aimer des objets artistiques abscons... Personnellement, en tant que femme, je n'ai pas été touchée et je ne vois pas non plus ce que "Avoir un corps" pourrait apporter comme vision plus fine de la féminité à un homme. Ce n'est pas parce qu'on sait ce qu'il se passe dans un corps de femme qu'on connait les femmes. Espérons que ce n'était pas cela que l'auteure souhaitait apporter à ses lecteurs.