Passionnante et très rabelaisienne restitution historique

Débarquée en Normandie en août 1415, l’armée anglaise menée par le roi Henri V s’empare de la ville d’Harfleur après un mois de siège, mais, épuisée par une épidémie de dysenterie, doit provisoirement abandonner la poursuite de sa conquête. Elle met le cap vers le Nord de la France, pour rejoindre la ville anglaise de Calais et rembarquer vers l’Angleterre. A proximité du village d’Azincourt, en Artois, ses quelques milliers d’hommes se heurtent à la fine fleur de la chevalerie française, accourue en masse leur barrer la route. Contre toute attente, la bataille qui s’ensuit le 25 octobre est un désastre sans précédent pour le camp français.


La défaite est d’autant plus cuisante qu’elle prend au dépourvu une armée, qui, avec l’avantage du nombre et la puissance de ses charges caparaçonnées d’acier, pensait, en toute arrogance, ne faire qu’une bouchée de la piétaille dépenaillée adverse. C’était sans compter la configuration du terrain, les conditions météorologiques et les « long bows » anglais : enlisée dans la boue après une nuit de pluie, serrée en contre-bas d’un terrain étroit où les chevaux abattus font chuter les autres comme des dominos, la cavalerie lourde subit dans une totale impuissance les tirs de sape d’une archerie inexpugnable dans ses retranchements.


Sérieusement documenté et pédagogiquement exposé, le récit pas à pas de cette bérézina sanglante qui mit fin à l’ère de la chevalerie - supplantée par la suprématie des armes à distance, mais aussi sabordée par d’irréparables erreurs stratégiques -, est aussi passionnant qu’édifiant. Prenant appui sur les aspects les plus ubuesques de cette déculottée d’une armée, tellement convaincue de sa supériorité et de l’immuabilité de principes éprouvés, qu’elle commet déjà bévue sur bévue au-delà même de comprendre que les règles du jeu ont changé, l’auteur transforme sa narration en une pantalonnade très politiquement incorrecte, au langage cru et à l’humour trivial qui sont sa marque de fabrique.


Peu friande du ton et du style rabelaisien de ce texte, j’ai davantage apprécié la restitution revisitée et indéniablement frappante d’un fait historique jusqu’ici très vague dans ma mémoire. Il n’est désormais plus près de s’en effacer !


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Cannetille
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le 25 août 2022

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Cannetille

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