Car sur Bankgreen, tout a une raison
Cette sentence, répétée à l'envi tout au long du roman, en est en fait son cœur, son leitmotiv. Car il faut savoir s'abandonner, accepter de ne pas comprendre tout ce qui se passe devant nos yeux, pour en saisir la quintessence. Celle de Bankgreen, cette planète mauve et noire, véritable personnage principal du roman de Thierry Di Rollo, celle sans qui rien ne serait.
L'auteur nous présente au gré du roman les différents êtres qui la peuplent : des Digtères aux Arfans, des Shores aux Emules, en passant par les immortelles Runes ou bien par un Hunum obsédé par le temps qui passe, à tel point qu'il en oublie de vivre, jusqu'à Mordred le dernier varanier, chevaucheur de varan quasi immortel, qui voit la mort de ceux qu'il croise. Certains se débattent pour survivre, d'autres pour être libres, d'autres enfin n'hésitent pas à manipuler les peuples pour nourrir leurs desseins (réflexion ô combien pertinente en ces temps troublés...). Mais au final, seule Bankgreen compte, car elle a été et sera, bien après la disparition de tous.
Thierry Di Rollo parvient à installer des ambiances renversantes, faites de mauve, de noir et de neige. Tour à tour étincelante de noirceur, onirique, ténébreuse, poétique, la plume de l'auteur est ciselée, pensée jusque dans les moindres détails, jusqu'à certaines sublimes fulgurances, à l'image de ce superbe prologue.
Roman totalement atypique sur la mort, le temps qui passe, la violence, la nature humaine, on est bien loin de la fantasy classique. L'histoire elle-même passe au second plan, symbole d'une oeuvre impressionniste, magnifique autant sur le fond que sur la forme. Oubliez tout ce que vous avez lu jusque là. Et laissez vous porter. Jusqu'à Bankgreen, la mauve et noire. Vous en ressortirez changés.
Car sur Bankgreen, tout a une raison.