Je parie que pour la plupart d’entre vous les mots "Ben-Hur" évoquent d’abord – et avant tout – une grande fresque cinématographique de la grande époque de la MGM. Liée à cette évocation, l’image marquante d’une course de chars effrénée dans un cirque romain bondé. En tout cas, c’était ce que m’évoquaient ces mots avant d’ouvrir ce roman et, comme je suis d’une ignorance crasse pour ce qui est du cinéma de mes aïeux, je n’avais même pas vu le film de William Wyler. Après ma lecture du plus célèbre roman de Lewis Wallace, je vais sans aucun doute remédier à cette lacune étant donné le plaisir que j'ai pris à vivre cette épopée, digne des meilleurs péplums.
"Ben-Hur", c’est d’abord l’histoire d’une injustice qui, comme beaucoup d’injustices, entraîne un désir de vengeance épique à faire pâlir d’envie un Alexandre Dumas. Judah, héritier de la respectée maison Hur, est un aristocrate juif qui vit à Jérusalem. Quand débute l’action, son seul mécontentement dans l’existence réside dans le fait que son ami d’enfance, le romain Messala, revient de Rome gonflé d’ambition – comme tout Romain qui se respecte – tandis que lui s’attache davantage à la société et réfléchit aux moyens de s’y épanouir dans le respect de sa religion. "Vivre d’amour" pourrait être sa devise quand celle de Messala serait "Vive la guerre !".
Je ne souhaite pas entrer dans le détail du synopsis, je préfère vous dire que le récit de Wallace reflète ce que fut la vie de l’auteur, c’est-à-dire aventureuse et échevelée. Avocat, juriste, diplomate, général de l'Armée de l'Union lors de la Guerre de Sécession, gouverneur du Nouveau-Mexique de 1878 à 1881, cet écrivain plutôt méconnu des lecteurs français fut aussi celui qui mit à prix la tête de Billy-the-Kid ! Autant dire que son principal protagoniste, Judah Ben-Hur, porte en lui les germes de l’héroïsme.
"Ben-Hur", c’est un souffle, c’est une porte ouverte sur le monde romain qui m’a replongée avec délices dans l’atmosphère du "Quo vadis ?" d’Henryk Sienkiewicz, c’est une maîtrise de la narration digne des plus grands auteurs de fresques historiques, et un style à rapprocher du susnommé Dumas. Je ne me suis pas ennuyée une seconde au fil des 500 pages du récit dont le rythme soutenu ne vous laisse aucun répit entre les différents lieux traversés, qu’il s’agisse de la belle Jérusalem ou de l’aride désert de Syrie, de l’antique Antioche ou du funeste Golgotha. Aux côtés de Ben-Hur, vous serez tour à tour prince et mendiant, esclave et guerrier, amant et fils dévoué ; comme lui, vous aimerez, vous souffrirez, vous espérerez, et vous croirez.
Cerise sur le gâteau, vous vous cultiverez – ou rafraîchirez vos connaissances - en vivant la genèse de la foi chrétienne à travers l’histoire de Jésus le Nazaréen qui s’inscrit en filigrane de la quête de Ben-Hur, donnant à ce roman d’aventures une dimension spirituelle et historiographique de belle facture.