Passionnant et édifiant ! Ce roman qui est construit à partir d’une compilation de faits avérés autour de la médecine expérimentale du 19è siècle aux USA, est une plongée en enfer mais aussi une lecture éblouissante tant l’art de créer une histoire atteint des sommets chez cette autrice. En quelques mots, il s’agit du journal d’un médecin peu remarquable, que le destin et le hasard ont propulsé directeur d’un asile où étaient enfermées des femmes aliénées (définition sujette à caution à l’époque).
Sans réel contrôle de ses agissements, il se déclare chercheur et multiplie les expériences les plus immorales et les plus abjectes sur ces recluses. Certes l’état des connaissances scientifiques expliquent certaines aberrations, mais les infirmières qui l’assistaient semblaient douées d’une compassion et d’une compréhension des choses plus logiques que lui. Animé d’une ambition destinée à se faire valoir auprès de son père qui l’a toujours considéré comme un raté, aucun doute moral ne l’arrête.
Le propos est étayé par d’autres témoignages : ceux du fils de Weir, mais également de la jeune femme albinos qui, après avoir été l’objet de ses expériences, est devenu sa collaboratrice.On est loin du consentement éclairé préalable à tout essai thérapeutique ! Les balbutiements de la science et l’idée générale que les humains ne sont pas tous égaux, selon leur sexe et leurs couleurs de peau, ont permis de tels aberrations.
Le mérite de Joyce Carol Oates est de mettre en lumière ces faits révoltants et d’en faire un roman qui se dévore.