Le style est particulier : cru, vulgaire, qui ne s’embarrasse pas vraiment de lyrisme, calé sur le parler (expressions et vocabulaire) de Gloria, le personnage principal (même si le récit est écrit à la troisième personne du singulier). Le Monde de Gloria et le style de l’auteur se retrouve dans ce caractère saccadé, parfois sans lien d’une phrase à l’autre. Le climat n’est pas tellement poétique : « Gloria était comme un échangeur d’autoroute » (merci la métaphore ^^).
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Un passage résume parfaitement les deux phases du récit (la jeunesse de Gloria et sa vie actuelle) :
« Éric et Gloria n’apprenaient rien, ils prenaient du bon temps et une
revanche sur les angoisses. Plus tard de façons différentes, l’un et
l’autre réaliseraient à quel point le punk rock n’avait pas été une
bonne préparation à la vraie vie… trop de rigolade, trop d’utopie : le
retour au réel ne leur plairait pas. »
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Tout est là.
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Gloria est une jeune fille pleine de colère, aux limites (de quel côté ?) de la maladie mentale. Elle est empêtrée là-dedans, passe son temps à se chercher à travers l’alcool, les drogues, le sexe et l’errance. Son entourage (ses « amis ») ne l’aide pas vraiment à s’en sortir, ils s’amusent de ses crises et la confortent même dans cette effrayante susceptibilité et s’en servent même à l’occasion, un peu comme d’un chien d’attaque. Ses parents ont essayé de l’aider une fois en la faisant interner en HP sans grand résultat : personne ne vient la stopper alors qu’elle a justement besoin de ça, de quelqu’un pour enrailler le crescendo de ses crises, seule elle est désemparée et ne sait pas s’arrêter. Elle aussi est fatiguée de tout ce déchaînement. . Gloria est un peu une « looseuse de la féminité » : elle a un physique médiocre voire ingrat, inapte à aimer les hommes ou à s’en faire aimer.
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Elle est à l’opposé des « héroïnes contemporaines qui elles aiment les hommes, les rencontrent facilement, couchent avec eux en deux chapitres, elles jouissent en quatre lignes et elles aiment toutes le sexe. »
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Gloria parait se révolter contre la vie en elle-même, elle a la rage, mais finalement c’est une rage de vivre, pas de détruire :
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Je fais pas exprès. Je suis pas des leurs. J’y arrive pas, à
m’intégrer. T’étais déjà comme ça, à Nancy. Ouais, t’as raison… je
suis bien nulle part. Je ferais mieux de me faire sauter le caisson,
mais j’ai pas envie de mourir moi. J’ai envie de tuer tout le monde,
c’est différent.
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Comment vivre avec les autres quand on ne peut même pas vivre avec soi-même ? Comment accepter les autres quand on ne s’accepte pas soi-même ?
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Ça devait être un principe thérapeutique : ne pas confondre être
humain et être interné. .
Elle pourrait au moins avoir un peu le vice
et tenter le rapprochement, en douceur, une petite opération séduction
bien menée … définitivement, elle préfère les gens qui manipulent aux
gens qui se ridiculisent.