Comme à mon habitude, j'ai jeté un regard sur les critiques disponibles avant d'écrire la mienne, en pensant - naïvement je l'accorde - que le plébiscite serait plus foudroyant que ça. Que nenni et en même temps, l'insipidité de la littérature française de "bon goût" produit une pelletée hebdomadaire de romans qui se ressemblent tous. Voilà une chose que je ne peux décemment nier, moi qui ne lit que des plumes étrangères. Mais s'il y bien une chose sur laquelle il va bien falloir que je défende ma chapelle, c'est qu'il convient de ne pas oublier qu'on y parle ici d'amour saphique et pris dans son contexte français et plus largement dans le contexte de la littérature LGBT, cela mérite d'être souligné.


Car oui, notre narratrice y décrit en long en large et en dans tous les travers poétiques possibles la relation passionnelle qu'elle entretien avec la sulfureuse Sarah dans un registre qui, je pense, rappellera quelques douloureux souvenirs à celles et ceux qui ont fait les frais de pareilles relations.


En deux parties, l'histoire est un très long écho, si ce n'est une variation sur le même thème et en général, ce style passe ou casse très fort. Pour ma part, je l'ai adoré mais je comprends à quel point cela peut se montrer rébarbatif à la longue. Quelque part, j'ai envie de dire: qu'est-ce que la passion si ce n'est une obsession rédhibitoire qui flirte avec la démence ? Il faut donc beaucoup de com-passion pour s'attacher à la narratrice et comprendre le pourquoi du comment de l'écriture répétitive qui, je le crois, possède un sens.


Je ne peux donc pas jeter la pierre à ce premier roman qui étale comme il faut toute la technique littéraire de son autrice mais là où je suis plutôt chafouin, c'est que cela reste un succès d'édition plus qu'un succès littéraire dans la plus pure des traditions franco-françaises. Ce qui me fait revenir à ma chapelle que je ne peux décemment oublier tant j'ai critiqué un nombre conséquent d’œuvres traitant du sujet. Force est de constater avec ce roman que la littérature française (à l'instar de son cinéma, admettons-le) n'attribue de valeur à des personnages LGBT que lorsqu'on y parle de tragédie larmoyante à souhait, écrite avec un dictionnaire sous la main pour sortir les mots les plus incongrus et inconnus de la langue française. Comme si pour connaître le succès avec ce thème, il fallait avoir fait les plus grandes écoles du pays et se faire passer (dans les mots en tout cas) pour un vieux bourlingueur littéraire ou un poète maudit. Ce qui me fait dire que ça raconte Sarah ne raconte rien d'autre que l'immobilisme éditorial et l'incapacité française de proposer quelque chose de radicalement nouveau, quitte à faire moins de vente et remporter moins de prix mais s'attirer la sympathie d'un public fidèle.


Je comprends donc parfaitement les critiques qui s'attaquent à l'aspect autobiographique que l'on retrouve ad nauseam dans les succès des dix dernières années et à cela, je leur répondrai que l'on ne peut pas accuser les plumes mais bien les maisons d'édition qui vouent un culte à ce procédé littéraire et ne cesse de le mettre en avant via les innombrables prix Goncourt et autres récompenses déconnectées des véritables attentes du public. "C strukturèle" dirait les plus fins sociologues des internets car en France, on mise sur les chevaux déjà gagnants plutôt que de les entraîner longuement à devenir des champions de l'originalité.

Thepunkowl
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le 17 août 2020

Critique lue 167 fois

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Engy Near

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