Alors que je lisais du Stephen King pour la première fois, j'étais vraiment impressionnée par la richesse de l'univers qu'il a créé et par sa peinture tant de l'enfance que de la société américaine. La tension qu'il distille ne naît pas uniquement de la présence mystérieuse et menaçante de Grippe-Sou, le clown mangeur d'enfants, mais de toutes les incarnations possibles de la figure du "monstre" (le père ou la mère abusifs, les brutes à l'école, les adultes vicieux, les hommes violents...).
J'étais emballée. Et puis, quand enfin, le dénouement arrive en traînant des pieds...
On nous sert une foutue sorte de "combat mental" contre une araignée géante ???
Toute cette tension accumulée pour un final qui ne fait même pas peur, et qui n'a pas non plus grand chose d'épique. Ce passage n'est pas du tout marquant.
En réalité, cette fin n'est même pas tout à fait cohérente : si on apprend que l'oeil humain est incapable d'appréhender l'apparence physique réelle de Ça (ce qui explique qu'iel apparaisse aux yeux des héros du roman sous la forme d'une araignée géante -- qui serait, soi-disant, l'incarnation d'une peur universelle), la forme du clown Grippe-Sou n'en serait donc qu'une parmi d'autres, choisie par Ça, pour attirer les enfants. Mais si cette forme ne prévaut pas sur toutes les autres prises par Ça au cours du roman (la momie, l'oiseau géant, le loup-garou, etc.), pourquoi ces autres formes arborent-elles néanmoins de façon systématique les trois pompons oranges du costume de Grippe-Sou ? Pourquoi tant d'importance donnée dans le roman à ce personnage du clown Grippe-Sou, alias Bob Gray, s'il n'est qu'imaginaire ? On n'aura pas la réponse.
Mais le moment le plus WTF et malaisant du roman arrive après le dénouement, lorsque...
Stephen King nous sert un gang-bang entre mômes de 11-12 ans totalement gratuit. Cette scène n'a pas de réelle justification logique, et ne semble exister que pour contenter les fantasmes les plus pédophiles de l'auteur, qui se justifie sous couvert que "c'est l'idée à la fille, et les garçons ont fait que lui obéir, parce qu'ils avaient pas le choix s'ils voulaient rester unis et trouver une sortie hors des égouts". Normal.
Si jusque-là, le fait que Beverly soit une fille -- la seule de la bande -- pouvait presque passer pour anecdotique (comme elle le dit elle-même aux garçons de la bande découvrant que ses seins poussent, ce n'est pas de sa faute si elle est une fille), la fixation du thème de la sexualité sur son seul personnage devient de plus en plus lourd au fil de la lecture, et atteint, à ce moment-là, un paroxysme insupportable. Une sorte de syndrôme de la Schroumpfette hypersexualisée.
On dirait vraiment qu'arrivé au climax de la tension de Ça, Stephen King n'a pas su comment se dépêtrer de son intrigue. Par conséquent, des ficelles narratives prometteuses (telles que l'arrivée en ville des conjoints respectifs de Beverly et Bill, ou le retour de leur ennemi d'enfance Henry Bowers) restent peu ou prou inexploitées. Le dénouement est vraiment bâclé, et gâche le livre, par ailleurs si riche. Les toutes dernières pages, animées d'un sentiment plus lyrique, permettent au moins de ne pas sortir de cette lecture de façon trop amère.