Sur le fond, ce bouquin est très intéressant, tout un chacun ne peut être un spécialiste de Spinoza et en voir une telle interprétation est passionnant. Lordon affiche son désamour du travail tel qu'il est pratiqué aujourd'hui et le démontre sur 200 pages de façon très structuré et progressive. Cette déconstruction, que je trouve pertinente, de ce que l'entreprise est devenue méritait cette éclairage particulier même si l'on peut regretter qu'aucune solution vraiment tangible soit proposée. Il s'agit surtout d'un état des lieux de ce que le monde du travail capitaliste propose, avec l'avis de Lordon sous-jacent, d'un point de vue parfaitement théorique.
C'est ici que le bas blesse et que le paradoxe de ce bouquin est flagrant. Lordon fait un bouquin à base de théorie, sans jamais utiliser d'exemple concret ou de mise en situation et cela manque. Ce livre a pour but de faire comprendre à une classe de personne exploitée les rouages de cette exploitation, son origine et ses défauts même si on aime son travail mais à aucun instant ce bouquin donne une chance à cette classe de le comprendre. C'est le paradoxe de ce livre, il veut expliquer quelque chose d’extrêmement complexe à un large public en utilisant lui même une forme complexe. Nombre de phrase m'ont rappelé ce moment de Friends où Joey utilise l'outil synonyme de Word pour écrire une lettre et qu'elle finit par ne plus avoir de sens. Bien entendu, ici chaque phrase a un sens mais lorsque l'on doit se "traduire" cette même phrase dans la tête après l'avoir lu et qu'une tout aussi compréhensible apparait on se demande si le but n'est pas juste d'en mettre plein les yeux.
Cependant, une fois abstraction faite de cette forme lourde, le développement de pensé est agréable à suivre, le découpage des chapitres bien pensé. Je regrette une conclusion sans ouverture mais bouquin à avoir lu quoi qu'il en soit.