Entre souvenirs de Marseille (ses cagoles reines, ses fumeurs de shit qui tiennent les murs, ses rues chaudes et inquiétantes où toutes les tenues et toutes les religions se croisent et s'entrechoquent) et récit des turpitudes sous les toits des Beaux-Arts de Cergy (son ultra-militantisme queer, ses débats sur l'inclusivité, ses étudiants hyper sexualisés, ses agressions, la transition comme nouvelle norme, la déconstruction désormais incontournable), Esther Teillard ausculte le mâle (violeur, forceur, client des putes chinoises du boulevard de la Villette, dragueur incestueux qui expose sa dernière prise tout juste majeure dans les soirées mondaines parisiennes) et les femmes qui "sentent le cul" (bombe sexuelle venue de l'Est, trans noire, étudiante qui voudrait être moins bandante, nana non moins désirable lorsqu'elle décide de devenir garçon), interrogeant le féminisme bourgeois contemporain, peignant la nécessité et la violence d'une sororité qui n'est pas la même selon où on la vit, et redéfinissant en fil rouge ce que sont les nouveaux punks.
Pas une page sans au moins une phrase ultra percutante. Un style cru, choc, vrai, brutal, organique et poétique, qui colle à la peau autant qu'il décolle de son siège. Un véritable éblouissement, surtout surgit d'une plume si jeune.
Paru il y a deux semaines, Carnes est la première claque littéraire de l'année, et le premier coup de maitre d'une romancière qui s'impose, du haut de ses 23 ans, comme la nouvelle Virginie Despentes. A suivre de très près !