Ce qu’il advint du sauvage blanc est un roman passionnant inspiré d’un fait réel rédigé d’une belle prose au vocabulaire riche de mots oubliés ou plus guère usités dans la langue française et qui contribue à nous imprégner du 19e siècle, période à laquelle se situe l’histoire.
François Garde, l’auteur, ancien administrateur supérieur de Terres australes et antarctiques françaises a pris le parti d’une narration à deux voix, pour cet ouvrage qui oppose deux voies, celle du monde dit civilisé représenté par les sociétés européennes dominantes du début de la révolution industrielle à celle d’un monde primitif qui s’éteint progressivement sous les assauts du progrès et d’une science avide de ne laisser aucun recoin de la planète inexploré, aucun domaine hors de son champ d’investigation.
D’un côté, Narcisse Pelletier, marin vendéen abandonné sur une place australienne sans eau et sans nourriture raconte sa lutte pour la vie qui passera par un retour à l’état sauvage, à un être humain originel après son adoption par une vieille femme aborigène, qui le prendra sous son aile et l’intègrera à son clan. Par étape, il nous entraîne sur le chemin de sa transformation, une mue qui lui permettra de survivre et mènera Narcisse vers Amglo, le nom primitif que lui ont donné les membres de sa tribu.
Le deuxième narrateur est Octave de Vallombrun, noble français mandaté pour s’occuper du sauvage blanc, retrouvé par hasard, dix-sept ans plus tard par un navire anglais. Il ne parle aucune langue connue, ne se souvient plus de son nom ou des coutumes occidentales. On suit ainsi les efforts du vicomte pour ramener Amglo vers Narcisse, un parcours qui ne laissera indemnes ni ses affections ni ses certitudes sur les bienfaits de la société de son époque.
Ce roman questionne sur la civilisation occidentale, sa croyance en un progrès continu nécessaire, seul moyen de résoudre les maux de la planète et d’apporter le bonheur... L’état actuel d’un monde au bord de l’explosion rend cette réflexion particulièrement pertinente et la détache des tentatives d’assimilation à des slogans de quelques gourous « new âge » ou autres fanatiques partisans d’un retour à l’état de nature.
Si nous pouvions remonter aux modes de vie originels et nous y adapter, à une société centrée sur la satisfaction des besoins primaires ou de l’essentiel, aurions-nous envie de revenir vers le monde d’aujourd’hui ?
Narcisse Pelletier a répondu par la négative.
Le chat Haret fit de même aux Kerguelen en renonçant à la domestication humaine pour retourner à l’état sauvage.
Est-ce là que François Garde qui y séjourna quelques mois trouva l’idée de ce roman guidé par sa propre expérience d’une vie au plus près de la nature ?
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le 2 avr. 2014

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