Le petit livre de Peggy Sastre, "Comment l'amour empoisonne les femmes" explore avec force références, la question de la structure biologique de l'amour. L'amour n'est pas une construction sociale, avance-t-elle, mais est une construction de l'évolution. Elle détaille comment désir, amour et attachement sont à replacer dans une perspective biologique, évolutionniste et neurochimique. Bien que court, le livre demeure assez technique et fait appel à nombre de notions et références. Nous avons besoin d'attaches pour vivre, et 200 000 ans d'évolution nous ont conduit à développer des attaches qui ont également une origine biologique. Non seulement l'amour est chimique, mais il est aussi une drogue qui vise à pirater nos comportements. La fameuse charge mentale (ou conscience parentale) et la prise en charge différenciée des tâches domestiques à la naissance d'un enfant s'expliquent sous cet angle.
En regardant nos rapports humains ainsi, la philosophe et journaliste scientifique "évoféministe" souligne combien nos rapports hommes/femmes sont prédéterminés, malgré tous les efforts que nous pouvons faire pour nous en départir. Le fossé comportemental est inscrit en nous. Il n'est pas réductible simplement, uniquement par le comportement.
Bien sûr, ce que nous dit Peggy Sastre nous dérange profondément. Hommes et femmes ne sont pas égaux, même s'ils aspirent à le devenir. Pour elle, ce ne sont pas des facteurs sociaux, culturels ou "patriarcaux" qui expliquent la différence entre hommes et femmes, mais bien des questions biologiques. L'accumulation d'études qu'elle verse à son point de vue, interroge. Le surinvestissement domestique s'explique tout autant que le surinvestissement matrimonial. L'amour n'est rien d'autre qu'une "débilitation cognitive" qui favoriserait "l'efficacité reproductive". Pour ma part, j'ai lu sa conclusion comme une perspective un peu ouverte. Face à ces déterminismes, nous n'avons guère de libre arbitre. Ou de les accepter ou de les refuser. Mais les refuser demande d'aller bien plus loin qu'un simple féminisme de façade. On ne se défait pas facilement de 200 000 ans de conditionnement. Un livre qui ouvre l'esprit !