Crash !
7.1
Crash !

livre de J.G. Ballard ()

Un soir pluvieux de juin, James Ballard perd le contrôle de son véhicule près de l'aéroport à l'entrée du toboggan de Western Avenue. Sa voiture traverse l'autre voie et percute de plein fouet le véhicule arrivant dans l'autre sens. Le conducteur, un ingénieur, est tué sur le coup, éjecté de son siège, il traverse son pare-brise pour venir atterrir sur celui de la voiture du narrateur. Le sang de l'homme macule la poitrine du personnage principal, jusqu'à faire croire aux sauveteurs qu'il souffre d'une grave blessure au cœur. La victime n'était pas seule, sur le siège passager gît sa femme, le Dr Helen Remington, gravement blessée, elle est emmenée au même hôpital que Ballard. Aussitôt, il conçoit une terrible attirance sexuelle pour la jeune femme, plus ou moins inconsciemment, désireux de faire revivre son mari dans leurs étreintes. James a eu les genoux brisés par leur choc contre le volant, et celui-ci s'est imprimé profondément dans la chair de sa poitrine. Alors qu'il n'a pas encore apprivoisé son nouveau corps, le blessé se découvre déjà une sensualité plus qu'exacerbée, voyant dans le moindre geste des soignants ou de sa femme à son chevet, des invites charnelles explicites. Un curieux jeune médecin couvert de cicatrices erre dans l'hôpital, Ballard l'ignore encore mais il s'agit de Vaughan, le prophète de l'érotisation de l'accident de voiture, présent sur toutes les scènes de crash armé d'un appareil photo pour assouvir ses penchants pervers. Le héros a mis le pied sans s'en rendre encore tout à fait compte dans un engrenage infernal qui le dépasse, un monde où la technologie et la sexualité sont intimement liés, où les blessures et mutilations dues à la route sont autant de nouvelles zones érogènes à découvrir.

On m'a chaudement recommandé Crash, je l'ai donc mis dans ma liste de mes priorités imminentes, et voilà. Ma toute première impression a été très mauvaise, a la lecture de la préface prétentieuse à souhait, je me suis dit, mais qui c'est ce con de J.G.B., puis après quelques secondes de réflexion j'ai compris que c'était l'auteur... Ce n'était pas dénué d'intelligence, mais la prétention et le ton m'avaient bien énervée. J'étais à deux doigts de laisser tomber la lecture du roman. J'ai toutefois poursuivi, le concept étant prometteur. En ce qui concerne le style, il n'y a rien à dire, les adjectifs choisis dans les descriptions sont toujours pertinents, et les scènes érotiques (okay, disons-le, pornographiques) arrivent à se renouveler malgré leur fréquence frénétique. L'univers, rappelons-le, Crash est un livre de Science-fiction, est actuel mais l'auteur met délibérément l'accent sur les publicités, les lumières et la technologie, rappelant l'écriture de certains de ses successeurs Bret Easton Ellis ou Palahniuck (il s'est inspiré de Crash très clairement dans son roman Peste)... Le personnage de Vaughan, véritable anti-héros du roman est une sorte de messie d'une nouvelle religion, dans laquelle on communie par le sperme dans des carcasses défoncées. Il s'entoure de femmes mutilées, de chauffards défoncés, et fantasme longuement, clichés à l'appui sur les accidents qui pourraient arriver aux grands de ce monde. Il voue une passion toute particulière pour Elizabeth Taylor, avec qui Ballard travaille, et écrit et réécrit le scénario onirique de leur rencontre, dans une explosion de tôle et de sang. C'est un personnage ambigu, par moments charismatique et manipulateur, à d'autres éteint et passif, et le plus souvent totalement incontrôlable. L'intrigue, quand à elle, est plus ou moins inexistante, j'ai eu l'impression de ne lire qu'une série de scènes sexuelles mises bout à bout... Le fameux concept révolutionnaire dont se targue l'auteur dans sa préface me laisse froide, autant je peux comprendre l'érotisme latent de cicatrices et de mutilations, mais d'un tableau de bord.. vraiment non. Ballard dirait sûrement que je ne veux pas m'avouer ma propre perversité, que mon inconscient, mes préceptes bourgeois ou mon éducation judéo-chrétienne m'empêchent de trouver un plaisir quelconque à la lecture de son livre, ou encore mieux un subtil mélange de tout cela. En ce qui me concerne je pense qu'il faut arrêter de vouloir mettre du sexe n'importe où pour vendre.

Crash a été adapté par le réalisateur David Cronenberg en 1996.

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le 7 mai 2011

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Diothyme

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