Dire que je n'ai pas aimé "Dans les forêts de Sibérie" est - de loin - une exagération. Néanmoins, j'ai ressenti comme un pointe de déception en refermant ce livre qui m'a pourtant beaucoup fait rire (l'humour de S.Tesson vaut le détour à lui seul) et beaucoup fait rêver : Tesson a changé.
En effet, dans "L'Axe du Loup" (paru précédemment, récit ou le même auteur raconte son périple à pied de la Sibérie jusqu'au Bengale, sur la trace des évadés du goulag), Sylvain Tesson impressionnait : jamais, dans la masse des récits modernes de voyage, je n'ai lu d'écrivain si vrai, qui ne cède pas à la tentation de glorifier à outrance les peuplades éloignées pour l'unique raison qu'elles sont différentes de la nôtre, société qui comme on le sait tous est si méchante et pourrie. Ce n'était pas un "proche de la nature" cucul la praline, Tesson. Tesson ne tombait jamais dans la facilité, si répandue aujourd'hui, qui consiste à voir les peuples pauvres et technologiquement retardés comme de Saintes nations de mère nature, peuplées de gens forcément plus sincères et plus authentiques que nous autres, dégoûtants occidentaux. Et heureusement qu'il ne le faisait pas - parce que cela est faux. Non seulement Sylvain Tesson ne tombait pas dans ce piège qui m'horripile, mais encore il se gardait de tout jugement moral profond ; son récit était poétique, humoristique et tenait lieu de journal de voyage (et quel voyage).
Dans les forêts de Sibérie, à mon plus grand malheur (et c'est ce qui fait que je n'ai pas mis de meilleur note au livre), Tesson semble s'intéresser davantage à la morale... C'est terrible, car si même lui s'y met, qui nous restera-t-il ?